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Il était large et trapu, doté de jambes courtes et de bras épais, et seulement revêtu d’herbe autour de la taille. Merry senti qu’il l’avait déjà vu quelque part auparavant, et il se souvint soudain des Púkel-men de Dunharrow. C’était là une de ces vieilles images ramenée à la vie, ou peut-être une créature descendant en droite ligne au long d’années interminables des modèles jadis utilisés par les artisans oubliés.
Il y eut un silence alors que Merry rampait plus près, et alors l’Homme Sauvage prit la parole, en réponse à une question, semblait-il. Sa voix était profonde et gutturale, et pourtant, à la surprise de Merry, il s’exprimait en parler commun, quoique d’une façon hésitante, et en y mêlant des mots frustes. »
1)
a langue des Drúedain de Beleriand semble avoir été un simple dialecte du halethien, bien qu’ils conservassent « certains mots qui leur étaient propres »2), comme Drughu, le mot qu’ils utilisaient pour se désigner, dont dérivent le sind. Dru, pl. Drúin, Drúath, le q. rú3) et le hal. drug4). On ne sait dans quelle mesure cette langue différait de celle de leurs cousins des Montagnes Blanches, mais au Troisième Âge, le parler de ces derniers était « entièrement étranger » aux langues des peuples voisins, Rohirrim ou Gondoriens5). (Il convient de noter que c’était aussi le cas du dunlandais, lui-même apparenté au halethien du Premier Âge6).) La langue des Drúedain d’Anórien paraissait rauque et étrange aux autres peuples, comme l’indique la rencontre de Merry avec Ghân-buri-Ghân7). Les rares Drugs qui connaissaient le westron le parlaient de manière hésitante8)9). Ghân-buri-Ghân lui-même le prononçait avec un accent guttural, et y mêlait « des mots frustes », comme gorgûn10), un terme qui signifiait « Orques » chez les Drúedain de Gondor et dérivait peut-être d’une langue elfique11).
Le drughu oriental perdura au moins jusqu’à la fin du Troisième Âge, puisqu’il était encore parlé par les Hommes Sauvages de la Forêt de Drúadan12) et par les tribus apparentées qui vivaient près des estuaires du Gwathló et de l’Isen13) Il est également fort probable que les Drugs du Drúwaith Iaur, ayant vécu dans l’isolation la plus totale jusqu’à la Guerre de l’Anneau14), parlaient toujours leur langue ancestrale. Toutefois, il semblerait que toute connaissance du drughu ait ultérieurement été oubliée15), bien que cela puisse simplement être dû à un arrêt des contacts entre les Hommes Sauvages et les autres races. À part Ghân-buri-Ghân, le seul autre Drúadan qui soit nommé dans le Légendaire est Aghan, le héros du conte de « La Pierre fidèle »16).
Selon Elfhelm, les Drúedain d’Anórien étaient capables de converser à distance au moyen d’un code utilisant des roulements de tambour17). En revanche, les Drugs « n’employaient aucune forme d’écriture avant d’avoir rencontré les Eldar », mais, à la différence des autres Atani, ils « n’apprirent jamais les runes et graphies des Eldar. Ils ne s’approchèrent jamais plus d’une maîtrise de l’écriture qui leur soit propre que par l’usage de certains signes, simples pour la plupart, servant à marquer les pistes ou à donner des informations et des avertissements. »18)
Une théorie de Roman Rausch, présentée ci-dessous, voudrait que les noms propres apparaissant dans l’histoire inachevée « Tal-Elmar » soient tirés du drughu. Toutefois, il paraît difficile de faire coïncider la phonologie de ces deux langues, et de nombreux points sont en contradiction avec ce que l’on connaît des Drúedain. Il semblerait donc qu’il faille rejeter cette hypothèse.
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