J.R.R. Tolkien — Février 2005
édité et annoté par Patrick Wynne
traduit de l’anglais par Vivien Stocker
Cet article est issu du journal linguistique Vinyar Tengwar 47, daté de février 2005 et édité par Carl F. Hostetter. Le traducteur remercie chaleureusement le Tolkien Estate, Patrick H. Wynne, Carl Hostetter et l’équipe éditoriale de Vinyar Tengwar pour avoir autorisé la publication de cette traduction. Il remercie également les nombreux relecteurs de la traduction.
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Plan de l’article :
Mains, doigts & numéraux eldarins et écrits associés
omme indiqué dans l’Introduction, le dactylogramme MDN est constitué de neuf pages numérotées 1–5, 6A et 6B, et 7A et 7B, où 6B et 7B sont des versions révisées de 6A et 7A. Il est clair que Tolkien acheva la révision de la page 6B avant d’écrire la page 7A, car le texte de 6B finit au milieu d’une phrase en quenya (imbe Menel Kemenye…), qui n’apparaît pas dans 6A mais qui se poursuit en haut de 7A et de 7B (…mene Ráno tie). Le texte principal donné ici est donc composé des p. 1–5, 6B et 7B et incorpore toutes les corrections et modifications faites sur le dactylogramme. Les modifications furent, pour la plupart, faites au stylo-bille, bien que quelques-unes furent écrites au stylo-plume ou dactylographiées au cours de la composition. Les lectures antérieures sont données dans les notes éditoriales et, sauf indication contraire, toutes les modifications furent faites à l’encre. Les passages tirés des anciennes pages 6A et 7A du dactylogramme qui diffèrent de façon significative des pages révisées 6B et 7B sont aussi présentés dans les notes éditoriales. Durant la rédaction de MDN, suivant sa pratique habituelle, Tolkien intercala ses notes directement dans le corps du texte principal. Elles ont été retirées et déplacées à la fin de l’essai dans la section « Notes de l’Auteur ». Des numéros ont également été ajoutés à chaque paragraphe de MDN pour faciliter les références croisées dans les notes éditoriales.
1. q. má
§1 Les Eldar considéraient que la main avait une grande importance personnelle, juste derrière la tête et le visage. L’eldarin commun possédait plusieurs mots pour cette partie du corps. Le plus ancien (probablement) et celui qui a conservé un sens général et non spécialisé — faisant référence à la main toute entière (y compris le poignet) dans toute attitude ou fonction, avait probablement la forme maȝa en eldarin commun primitif, un radical spécifique au sens « main » et n’ayant aucune autre signification. Il pourrait avoir été apparenté (bien que ce soit naturellement purement hypothétique) à l’eld. com. MAGA, un radical signifiant « bon » — mais sans référence morale, excepté par implication : c.-à-d. qu’il n’était pas l’opposé de « mal, méchant » mais de « mauvais (endommagé, imparfait, inadapté, inutile) » et le radical adjectival dérivé *magrā signifiait « bon pour un usage ou une fonction, comme attendu ou désiré, utile, approprié, adéquat. »
§2 Puisque la fricative vélaire faible ȝ, bien qu’originellement peu rare en eldarin, semble avoir été perdue avant la fin de la période de l’eldarin commun (Note 1), le mot pour main devint mā ; mais le radical verbal dérivé maȝtā > maχtā : q. mahta- « manipuler, manier, diriger, s’occuper de » ; tel. matta ; sind. maetha. Má resta en usage en quenya, avec la paire duelle mát ; mais le seul pluriel en usage (à n’importe quelle période attestée) fut máli. Le pluriel en vieux quenya *mai et le pluriel réformé *már n’étaient pas utilisés, sans doute en partie à cause de leur conflit avec mai « bien » (adverbe issu du radical MAG1)) et avec már « demeure » ; mais le pluriel général ou complet était, dans de tels mots, rarement nécessaire (Note 2). Des affirmations générales telles que « les mains sont plus agiles que les pieds » étaient le plus souvent exprimées au singulier : « la main est plus agile que le pied ». Dans des cas tels que « ils levèrent leurs mains », main était, en syntaxe eldarine, toujours au singulier si chacun (ce qu’il n’était pas nécessaire d’exprimer) levait une main et toujours au duel si chacun levait les deux mains ; le pluriel était impossible. Dans le langage courant, le quenya má était souvent remplacé par maqua : voir ci-après2).
§3 La forme sindarine maw était un mot obsolète et poétique, principalement préservé dans le langage ordinaire dans les dérivés comme maed « habile, adroit » (= q. maite) ou dans des composés anciens et obscurs tels que for-vaw > forvo « la main droite, le côté droit », har-vaw > harvo « la main gauche, côté gauche » ; molif « poignet » = « main-lien » : eld. com. *mā-limi, q., tel. málime (radical eldarin commun LIM « lier, joindre »)3).
§4 En telerin non plus, mā n’était plus en usage et fut remplacé par l’eld. com. makwā, excepté dans les dérivés ou composés identiques ou similaires à ceux cités pour le sindarin : comme forma, þarma, « droite-main », « gauche-main » = q. forma, hyarma4).
2. q. maqua
§5 L’eldarin commun possédait aussi le mot *makwā : q. maqua, tel. mapa, sind. mâb, mab-. Les anciens noms monosyllabiques étaient une petite classe, fréquemment remplacés par des formes modifiées en eldarin commun tardif ou dans les langues dérivées5) ; et mā appartenait aux quelques-uns qui se terminaient ou qui, durant la période de l’eldarin commun, en vinrent à se terminer par une voyelle (Note 3). Les usages de makwā indiquent qu’il était formé par addition de l’élément kwā, le radical de nombreux mots au sens de « entier, complet, tout » et signifiait, au début, « une main-pleine, main complète avec les cinq doigts ». Le mot devait avoir été créé en eldarin commun, mais après que *maȝa > mā ; la voyelle longue de mā aurait alors été raccourcie avant les deux consonnes kw, un processus phonétique normal (Note 4). Que makwā fut, à l’origine, connecté avec le jeu de main et le comptage primitif (voir ci-dessous) est visible en quenya, dans lequel sa fonction originale fut préservée : maqua continua d’être utilisé comme groupe numéral « groupe de cinq choses (similaires) » et le duel maquat pour « un groupe de dix » (Note 5). Mais puisque c’était un mot commode de forme normale qui n’offrait aucune difficulté de déclinaison (à l’inverse de ma : voir ci-dessus) et ressemblait à ma (la main entière dans toute attitude), il était généralement communément utilisé en quenya pour le membre « main »6). En telerin et sindarin, il devint le mot normal pour « main » : tel. mapa, sind. mâb7).
§6 NOTE : C’est la dérivation proposée par Pengoloð. Les anciens maîtres du savoir — influencés par le a court de makwa et n’ayant pas observé que kwa était un élément suffixé — supposèrent que makwa était seulement « accidentellement » apparenté à ma et était, en fait, dérivé de la base MAP (tel. mapa-) « se saisir de, empoigner », la forme en quenya étant dérivée de mapa avec kw substitué à p (pour différencier les deux labiales)8). Ils citaient la base NAP comme un autre type de différenciation. Mais il n’y a aucune autre preuve d’une base MAP (elle est introuvable en quenya ou en sindarin) : en telerin, le v. mapa- dérive évidemment de mapa « main » et non l’inverse, étant probablement une variation délibérée de NAP, pour exprimer « empoigner avec la main entière »9). Pour la signification de NAP, voir ci-dessous à propos des « noms des doigts »10).
§7 L’eldarin commun possédait deux autres mots pour « main », limités à l’origine à des attitudes et des fonctions bien particulières ; et aussi un mot pour le « plat de la main ou paume ».
3. q. kamba
§8 L’eld. com. kambā était un dérivé instrumental de KAB « tenir, contenir, retenir » (Note 6)11) ; il se référait ainsi à la main entière, mais fléchie, avec les doigts plus ou moins refermés, en coupe, dans l’attitude de réception ou de tenue12). Kambā devait être préféré au mot général lorsqu’on parlait de ces attitudes. Cela est exemplifié de manière frappante dans la légende de Beren, qui emporta l’un des Silmarils de la couronne de Morgoth ; mais sa main droite fut arrachée au poignet par Carcharoth, le loup qui gardait la porte supérieure d’Angband. On lui donna donc le titre Erchamon13) (en forme en quenya Erkambo) « Homme à la main-unique » et aussi Camlost « main-vide ». Ce dernier est dû au fait que, quand il ramena Lúthien à son père, le Roi Thingol demanda à voir le Silmaril, la dot que Beren avait juré de rapporter ou de ne jamais revenir en Doriath et Beren répondit :
§9 « Ma main tient le joyau » et il tendit sa main gauche, ouvrant lentement ses doigts ; et elle était vide. « Hélas ! » s’écria Beren, « il est dans l’autre main, mais elle n’est pas ici. »14) Ensuite, vint la grande chasse au loup dans laquelle Beren, Thingol et son grand champion Mablung mirent finalement Carcharoth aux abois. Beren fut mortellement blessé par le loup, mais Mablung le tua et déchira son ventre pour en sortir la main droite de Beren — sa kamba, tenant toujours le Silmaril et, de par sa protection, non-mortifiée et propre. Mais, à sa surprise, la main et le joyau parurent avoir un si grand poids que la propre main de Mablung fut entraînée vers la terre et contrainte de s’ouvrir, laissant l’autre chuter au sol. Il a été dit que le nom de Mablung (« la Mainlourde ») était prophétique ; mais ce fut peut-être un titre issu de l’épisode qui devint par la suite celui par lequel le héros entra dans la légende15).
4. q. quár16)
§10 L’eldarin commun avait une base KWAR « presser ensemble, serrer, tordre ». Un dérivé était *kwāră : q. quár, tel. pār, sind. paur. Il peut être traduit par « poing », bien que son usage principal soit une référence à la main hermétiquement fermée comme pour utiliser un instrument ou un outil artisanal plutôt qu’au « poing » utilisé pour cogner17). Cf. le nom Celebrin-baur > Celebrimbor. C’était une forme sindarisée du tel. Telperimpar (q. Tyelpinquar)18). C’était un nom fréquent parmi les Teleri qui, en plus de la navigation et de la construction de navires, étaient aussi renommés comme orfèvres. Le fameux Celebrimbor, défenseur héroïque de l’Eregion au cours de la guerre contre Sauron au Deuxième Âge, était un Teler, l’un des trois Teleri qui accompagnèrent Celeborn en exil. C’était un grand orfèvre et il vint en Eregion, attiré par les rumeurs du métal merveilleux découvert en Moria, l’argent-Moria, auquel il donna le nom de mithril. Dans l’ouvrage de ce dernier, il devint un rival des Nains ou plutôt un égal, car il y avait une grande amitié entre les Nains de Moria et Celebrimbor, et ils partageaient leurs compétences et leurs secrets d’artisan. Dans la même veine, Tegilbor était utilisé pour quelqu’un de doué en calligraphie (tegil était la forme sindarine du q. tekil « plume », inconnu des Sindar jusqu’à l’arrivée des Noldor). En eldarin commun et dans les langues dérivées, le *kwāra était aussi utilisé comme un symbole de pouvoir et d’autorité.
5. q. palta
§11 L’eldarin commun avait aussi le mot palatā19), un dérivé étendu du radical eldarin commun PAL : palat, palan- « vaste, étendu » (avec également, à l’origine, l’implication que l’étendue était plus ou moins plate et uniforme, sans entrave au mouvement ou à la vue). Cf. q. palan, adv. « loin et vaste » ; palda « vaste, large » (< palnā). palátā, q. palta, tel. plata, sind. plad20), signifiait « le plat de la main, la main tendu vers le haut ou vers l’avant, plate et tendue (avec les doigts et le pouce fermés ou écartés) »21). Cette attitude avait de nombreuses significations importantes comme gestes dans les coutumes eldarines (q. Mátengwie « langage des mains »)22). La paume de la main vers le haut était un geste de récipiendaire ou de quelqu’un demandant un présent ; les deux mains ainsi dirigées indiquaient que celui-ci était au service ou sous les ordres d’une autre personne. La paume de la main vers l’avant (Note 7) à l’égard d’autrui était un geste d’interdiction, commandant le silence, la halte ou l’arrêt de toute action ; interdisant l’avancée, ordonnant la retraite ou le départ ; rejetant une requête (Note 8). Le geste du Dúnadan Halbarad (RR, p. 50) n’était donc pas un signe elfique et il aurait été bien mal reçu par eux23). Dans un tel cas, leur geste était d’ouvrir les deux bras en grand, un peu en-dessous du niveau de l’épaule, paumes vers l’extérieur : dans ce cas, comme dans le geste humain, la paume ouverte signifiait « sans arme », mais le geste elfique ajoutait « dans aucune main » (Note 9). L’extension des doigts modifiait la signification. Le geste de récipiendaire ou de demandeur, si les doigts et le pouce étaient ouverts, indiquait la détresse et l’urgence du besoin ou la pauvreté. De la même manière, le geste d’interdiction était rendu plus hostile et menaçant, indiquant que si l’on n’obéissait pas immédiatement au commandement, la force et les armes pourraient être utilisées.
§12 Du même radical eldarin commun étendu, dérivait le verbe *pal’tā (Note 10), q., tel. palta « passer la paume sensible sur une surface : ressentir avec la main, caresser », etc. Le verbe sindarin de même sens, plada-, se substituait au radical des mots pour « paume » : plad de l’eld. com. palátā. L’omission par perte phonétique de la voyelle (courte) non accentuée avant l’accent eldarin commun était fréquente en sindarin, entre les occlusives et l, r, et usuelle en telerin, dans les mots dont la forme demeurait au moins dissyllabique en telerin24). En quenya, la position de l’accent eldarin commun n’était pas importante, puisque à une période ancienne, le quenya avait repositionné l’accent vers la première syllabe.
§13 Les Eldar ne ressentaient aucune distinction entre la droite et la gauche. Il n’y avait rien d’étrange, de mauvais augure (sinistre), de faible ou d’inférieur à propos de la « gauche ». Ni rien de plus correct, approprié (droit), de bon augure ou d’honorable à propos de la « droite » (Note 11). Les Eldar étaient « ambidextres » et la répartition des différents services et devoirs habituels à la droite ou la gauche était une affaire purement individuelle et personnelle, non régie ni héritée d’une habitude raciale générale. Un Elda pouvait habituellement écrire des deux mains ; s’il écrivait avec la gauche, il commençait du côté droit, si c’était avec la droite, du côté gauche — car les Eldar trouvaient plus confortable que la main d’écriture ne soit pas de nature à recouvrir ce qui venait d’être écrit immédiatement avant la lettre sur laquelle elle était engagée (Note 12).
§14 En faisant les gestes décrits ci-dessus, chaque main était utilisée sans modification de la signification. Les faire avec les deux était plus emphatique, indiquant que le geste exprimait un ordre de toute la communauté ou d’un groupe, ou du roi ou de l’autorité via un héraut ou un subordonné. Les figures de pierre des Argonath levaient chacune une main, paume vers l’avant, mais c’était la main gauche (FdA, p. 494). C’était un geste humain : la main gauche était plus hostile et son usage autorisait à disposer la main droite sur une arme : une hache.
§15 Les cinq « doigts » comprenaient le pouce. Le mot eldarin commun était *leper- (Note 13), un dérivé de l’eld. com. LEP « ramasser, choisir » avec les doigts ; cf. q., tel. lepta-, sind. leutha-25). Pour « doigt », le quenya avait leper, plur. leperi ; de même en telerin ; sind. leber, plur. lebir26). Le numéral pour « cinq » était certainement apparenté. Outre la forme pleine eld. com. leper, il en existait sans aucun doute une forme plus simple *lepe (qui apparaît dans plusieurs noms pour les différents doigts d’une main). Une ancienne formation plurielle issue de celle-ci, avec l’eld. com. –m(e), était lepem(e) qui produisit finalement le mot pour « cinq » : tel. lepen, sind. leben, q. lempe avec la transposition en quenya < lepne avec la syncope quenya < lepene. La forme telerine pourrait remonter à l’eld. com. lepem avec une dissimilation du m : le –m final de l’eldarin commun survécu tel quel en telerin, mais comme n en quenya, et fut perdu en sindarin. Mais les trois formes remontent plus probablement à l’eld. com. tardif lepene avec une perte du sens de la pluralité et l’addition d’un e, sur le modèle des autres numéraux de 3 à 9, qui possédaient tous, en plus des formes courtes (comme nel- 3), des formes longues par addition d’une troisième consonne avec une sundóma, longue ou courte (comme nelede 3 ; q. nelde)27).
§16 Pour un autre mot pour « cinq » (q. makwa) : voir ci-dessus. Il était utilisé pour compter par cinq, avec le duel maquat « paire de cinq » pour « dix » : maquanotie était le quenya pour le « système décimal » de comptage.
§17 En quenya, les doigts étaient appelés, en comptant depuis le pouce vers l’extérieur : nāpo28) « pouce » ; lepetas29) « premier doigt ou index » ; lepenel ou lepende « doigt du milieu, majeur » ; lepekan « quatrième doigt, annulaire » ; lepinka « petit doigt, auriculaire ».
§18 Dans les jeux d’enfants, les noms donnés (auxquels de nombreuses histoires étaient attachées) étaient : atto/atya ; emme/emya ; tolyo ou yonyo ; nette ou selye ; wine ou winimo : c’est-à-dire « papa », « maman », « celui qui est dressé » ou « grand garçon » ; « demoiselle » (« fille »), « bébé »30). Les doigts et les orteils étaient nommés tille (plur. tilli) « extrémités, pointes » ; ou différenciés par ortil(li) « sur-pointe(s) » et nútil(li) « sous-pointe(s) »31). Les mêmes noms ludiques ataryo/taryo32), etc., pouvaient être donnés aux orteils.
§19 Dans le langage ordinaire « orteil » était taltil (plur. taltilli) ; le gros orteil était taltol ou tolbo33), et les autres orteils n’avaient pas de noms particuliers, mais étaient comptés depuis le gros orteil vers l’extérieur34).
§20 Le q. taltol35) « gros orteil » et tolyo, le nom ludique du lepende, contiennent tous deux le radical eldarin commun TOL « debout (à l’extérieur et au-dessus de choses voisines) », principalement appliqué à des objets qui étaient, par rapport à ceux auxquels ils étaient comparés, plus larges et plus épais : e.g. des cimes de montagnes, de très grands arbres ou un homme grand et fort. Une application topographique fréquente concernait les îles qui émergeaient de l’eau (mer ou rivière) avec des pentes abruptes (Note 14). Le q. tolbo est également apparenté : une « invention », évocation de TOL, plutôt qu’un dérivé d’une extension TOLob, puisqu’il ne survient que dans l’eld. com. tolbā « une protubérance, en part. conçue dans un but précis : un bouton ou le manche arrondi d’un outil » ; duquel tolbo est une forme « agentive » — il appartient probablement aux noms ludiques plutôt qu’aux noms normaux36).
§21 Les autres noms contiennent lepe- « doigt » (une forme plus ancienne du leper tardif)37) : lepetas (plur. lepetassi) est + eld. com. tassă issu de la base TAS « pointer, indiquer » (Note 15)38). lepende est + l’élément eldarin commun ened « milieu, centre » ; la forme plus ancienne lepenel est plus intéressante. Elle fut interprétée comme « doigt numéro-trois ». Mais une étude plus approfondie des noms des numéraux eldarins jusqu’à 10 suggère que la signification « milieu » était la plus ancienne et la source des formes du numéral 3. Dans les jours anciens, avant le Grand Voyage, tandis que la construction de la langue eldarine commune était en cours, jouer avec les mains et nommer les doigts allaient de pair avec le nommage des numéraux (ceux au-dessus de 2). La main était l’instrument de comptage primitif (Note 16). Durant le premier stade, une main était utilisée comme unité de groupe et les noms furent créés pour ses proéminences séparées. Plus tard, les deux mains furent disposées avec les extrémités des pouces se touchant. Du premier stade, vint le numéral 5 (voir ci-dessus) ; et aussi le mot makwā (voir ci-dessus) « main-pleine », qui continuait d’avoir en quenya, et dans l’usage familier, le sens « tas, groupe, partie composée de cinq choses ou éléments ». Maintenant, le doigt proéminent du milieu était aussi le troisième, que l’on compte depuis la gauche ou depuis la droite. Il est donc clair que l’eld. com. ened, enel « milieu » et le radical (e)nel-ed (q. nelde) 3 étaient apparentés39). Plus tard, dans l’eldarin commun organisé, ened, ende furent utilisés pour le nom et l’adjectif « milieu » et nel ou la forme étendue nelede pour « trois ». Mais en quenya, enel resta comme une préposition « entre » = la position centrale d’une rangée, d’une liste, d’une série, etc., mais était également employé dans le cas de trois personnes (Note 17). Il différait de l’eld. com. imbi et mīni (tous deux probablement dérivés de MI « dans ») en ceci qu’enel se référait à la position d’une chose entre d’autres de même type, tandis que imbi (q. imbe) et mīni (sind. mîn, min-) désignait un vide, un espace, une barrière ou tout autre chose intervenant entre deux autres choses (semblables ou non l’une à l’autre) : comme dans imbe met « entre vous et moi », imbe siryat « entre deux rivières » (Note 18) ; imbi Menel Kemenye mene Ráno tie « entre le Ciel et la Terre va le chemin de la Lune »40). La variation d/l observée dans ened/enel était probablement ancienne : en eldarin commun d et l se trouvaient comme variantes dans de nombreuses bases et éléments suffixaux sémantiquement liés41).
§22 D’autres relations entre les noms des doigts et les numéraux peuvent être observées. Les mots pour 8 et 9 en sont des cas évidents (Note 19). Ils appartiennent au second stade : l’usage des deux mains, collées pouce à pouce, mais comptant depuis le pouce vers l’extérieur puis retournant au second pouce après « cinq »42). Les doigts proéminents du milieu étaient ainsi 3 et 8. L’eld. com. TOL (« se dresser ») apparaît à la fois dans le nom ludique tolyo pour ce doigt et dans tolod- base du numéral 8, l’extension + d étant évidemment modelée sur neled- 343).
§23 Le numéral pour 9 était neter-. Cela ressemble au nom ludique nette pour l’annulaire, qui était aussi, dans le jeu à deux mains, le 9. Ce nom est l’un des anciens noms ludiques, puisque des formes liées se trouvent en telerin et sindarin (Note 20)44). Cette ressemblance fut rejetée comme étant « fortuite » par les anciens maîtres du savoir. Ils soulignaient que le nom ludique tolyo était évidemment plus ancien que les noms ludiques fantaisistes qui traitaient les doigts comme des membres d’une « famille » : père, mère et enfants. Il n’appartenait pas vraiment à ce groupe car, comme les mots des numéraux 3, 5 et 10 et les noms adultes des doigts, il dépendait de la position, de l’apparence ou de l’usage des doigts. La relation entre tolyo et tolod était ainsi naturelle et, de fait, tolyo était plus probablement dérivé du numéral que l’inverse45). Mais nette signifiait « sœur » ; et ne contient par le radical eldarin commun NET : il est dérivé de l’eld. com. NETH « sœur », dont il était une altération habituelle utilisée dans le langage familier affectueux (Note 21)46). neter contient NET ; mais comme dans le cas de 4 kan-at, 6 enek et 7 otos, c’est une invention sans aucune relation claire avec d’autres radicaux ou mots eldarins communs.
§24 Pengoloð cite ces objections, mais demeure de [l’] avis que la ressemblance entre nette et neter au point 9 du comptage à deux mains ne peut pas être une simple coïncidence. Son intéressante explication est, en bref, celle qui suit. Il accorde que bien qu’anciens (déjà [en] eldarin commun) les noms ludiques personnalisés sont plus tardifs que l’invention et l’organisation des numéraux de 1 à 10 et qu’ils furent imposés à un système ancien dont tolyo est une importante et intéressante survivance ; nette est donc en quelque sorte lié à neter ou en est dérivé. À présent tolyo possède un autre nom : hanno « frère » (Note 22) ; mais nette n’a pas d’alternative47).
À moins qu’elle ne fût placée avant les dentales t et s, auquel cas, elle était dévoisée en χ : χt, χs. Devant les autres consonnes, elle était perdue avec l’allongement de la voyelle précédente.
En fait, en quenya, les mots tels que ceux employés pour les parties du corps, en particulier celles intervenant par paires, formaient rarement les pluriels en –li, à moins qu’ils fussent phonétiquement pratiques ou pour d’autres raisons, comme avec máli ; et la forme choisie, quelle qu’elle fut, suffisait aux deux fonctions.
Les seuls autres survivants en tant que tels dans une ou plusieurs langues dérivées étaient : pē « lèvre » (q. pé) ; srā (sind. rhaw) « chair » ; lō « eau dormante » (tel. lō « mare, lieu de baignade, en part. eau laissée dans un creux de roche par la marée descendante ») ; sū « vent » (q. sú « son du vent ») ; lū « arc, courbe » (tel. lū « arc » — à comparer à lūta- « arquer, courber », v.) ; grā (sind. graw « ours »). Tous ceux-là, à l’exception de pe et su, avaient probablement perdu une consonne en eldarin commun : ȝ dans lo et lu et un –w final dans sra, gra48).
Bien que cela ne dut pas nécessairement être observé dans la période plus tardive de l’eldarin commun ce fut bien manifestement fertile en nouvelles inventions.
Quelque peu similaire à notre usage de demi-douzaine et de douzaine pour six et douze.
< kab-mā : bm semble être habituellement devenu mb, non mm, en eldarin commun.
À hauteur d’épaules ou plus haut. L’élévation ajoutait de l’emphase.
On ne levait donc jamais la main de cette manière pour saluer ou accueillir. Dans de tels cas, la main aurait été élevée paume vers l’arrière et, pour donner de l’emphase, avec une ondulation des doigts vers le signeur. En guise de salutation décontractée en passant, lorsqu’aucun autre échange n’était voulu, la main était tenue la tranche vers l’avant, avec ou sans mouvement des doigts.
De leur point de vue, nécessairement, puisque les Eldar ne faisaient aucune distinction entre les mains et leurs opérations : voir plus bas sur Gauche et Droite. Le geste d’Halbarad était fait avec la main droite.
(’) indique l’omission de la sundóma en eldarin commun (et non la perte phonétique). Dans le système eldarin commun de vocalisation des radicaux triconsonantiques, il n’était pas nécessaire d’insérer plus de deux fois la sundóma, à moins que la première ne soit initialement omise et remplacée par une sundóma extrudée initiale : dans ce cas, la vocalisation était ap’lata. De cette forme était dérivé le tel. aplat, sind. ablad « interdiction, refus » (en référence au geste), ne se trouvant pas en quenya ; mais cf. KAL « briller », kalar- (tel., q. calar « lampe »)49), aklara (tel. aclar, sind. aglar, quenya avec transposition alkar, « gloire, splendeur »).
Une substitution « enfantine » ou pédagogique pour l’ancien terme germ. tehs-, tehswa- (i.-eur. deks- comme en latin dexter), qui fut préservée seulement en gotique et v. h. all., excepté de façon précaire dans les noms de lieux tels que l’île de Texel : dans lesquels la signification pourrait avoir été « sud »50). Cet usage de « droit » pour le sud se trouve en sanscrit et est habituel en celtique51) ; mais il est secondaire et dû au comptage des points cardinaux depuis une position faisant face à l’Est (le soleil levant). Le radical i.-eur. deks- était, en fait, probablement apparenté au radical dek- « droit, correct, bon, approprié », familier en anglais dans les emprunts au latin : decent, decorous, etc.
Mais l’écriture était un cas particulier. Pour l’économie et la clarté, il était préférable que chaque lettre ait sa forme standard. Feanor avait conçu ses tengwar avec des formes plus pratiques pour la main droite et elles étaient considérées comme les formes « correctes » ; par conséquent, les tengwar étaient normalement écrites depuis la gauche avec la main droite, en particulier dans les livres et les documents publics. Si elles étaient écrites avec la gauche (comme souvent dans les lettres ou documents privés), les tengwar étaient inversées et étaient correctes dans un miroir52). Dans les « runes », d’arrangement et de formes plus tardives et plus élaborées, l’inversion était significative et il n’y avait aucune différence de pratique quelle que soit la main. Elles étaient écrites (ou gravées) dans n’importe quelle direction ou en alternance.
Probablement une formation agentive : *lepero. Les voyelles courtes accentuées étaient probablement perdues en position finale en eldarin commun après l, r, n, m. Cf. *abaro « celui qui refuse » > abar : q., sind. avar, tel. abar, le nom donné par les Eldar à ceux de leur parentèle qui refusèrent l’invitation des Valar.
Cf. le q. tolle « une île escarpée ». Il était utilisé sous la forme Tol- comme préfixe dans les noms d’îles : comme dans Tol-eressea. De même en sindarin : Tol Brandir.
À l’origine, probablement apparenté aux éléments pronominaux démonstratifs : ta, se.
Bien plus tard, mais avant la fin de la période de l’eldarin commun, les Eldar laissant derrière eux les débuts primitifs avec la main, conçurent un comptage en six et douze qu’ils utilisèrent dans tous les comptes plus élaborés ; mais dans l’usage familier et quotidien, beaucoup des termes décimaux restèrent usités.
Dans cet usage, il était principalement utilisé pour des personnes ; il en dériva le mot enelmo : « un entremetteur, intervenant, intermédiaire, médiateur ».
Cf. le sind. Minhiriath, nom de la région entre le Baranduin et le Gwathló53). En telerin, imbe survécu seulement comme nom : appliqué à « un vide, ravin ; passage bas et étroit entre de hauts murs ». En sindarin (en raison d’un conflit avec le réflexif im < immā, immō) imm, im (< imbi) survécu seulement dans imlad = tel. imbe, et imrad « un chemin ou une passe entre des montagnes, des collines ou dans une forêt vierge »54). Cf. Imladris « la Gorge de la Crevasse »55).
Néanmoins, 9 fut d’abord expliqué par Pengoloð. La plupart de ces remarques sont dérivées de son traité sur « Les doigts et numéraux eldarins » (Eldarinwe leperi ar notessi). Car, sans sa survivance fortuite, nous ne saurions rien des jeux de mains ni des « noms de famille » des doigts, qui apparaissent rarement dans les textes en quenya.
tel. nette ou diminutif nettice ; sind. nethig.
Eld. com. *nēthā « sœur » : q. néþa, nésa : tel. nēþa ; sind. nîth56). De là, était déjà créée une forme diminutive/affectueuse en eldarin commun, par réduplication de la consonne médiale > netthi (comme il est fréquent dans de tels mots). Le q. nette, tel. nette et sind. neth en sont des développements normaux (tth > q., tel., sind. préhistorique tt ; sind. plus tardif > þþ > þ) ; nettice et nethig présentent l’addition supplémentaire du suffixe diminutif eldarin commun –iki.
Dérivé familier (de même type que nette) < eld. com. KHAN « frère » : q., tel. hāno, sind. hawn (archaïque et donc remplacé par hanar dans le langage ordinaire, comme nethel pour nîth) avec le diminutif honig utilisé en jeu, comme nethig57)).
e texte manuscrit non-titré appelé ici NKE (voir l’Introduction), consiste en trois pages écrites à l’encre, en utilisant apparemment le même stylo-plume que pour écrire la révision de MDN §15 (voir note de l’éd. 27) et le synopsis de Eldarinwe Leperi ar Notessi de Pengoloð. Dans le coin supérieur gauche de la première page, Tolkien écrivit et souligna le mot « Accepter », ainsi que la phrase « Accepter cette dérivation de neter. » Comme noté dans l’Introduction, les formes apparaissant dans NKE indiquent qu’il doit être antérieur aux pages 7A et 7B de MDN. La preuve irréfutable à ce propos, est l’usage dans NKE du tel. nettica, sind. netheg. Ces deux formes apparaissent également dans 7A, bien qu’à leur première occurrence, elles furent corrigées à l’encre en tel. nettice, sind. nethig et à leur occurrence suivante dans 7A, les formes directement tapées sont tel. nettice, sind. nethig — après quoi, ce sont seulement ces dernières formes qui apparaissent dans 7B et dans ELN (voir note de l’éd. 44). En outre, NKE glose nette comme « demoiselle » et cite yonyo « fils » et selye « fille » comme noms alternatifs des troisième et quatrième doigts, respectivement ; cela s’accorde avec 7A, tandis que dans 7B et ELN nette signifie « sœur » pas « demoiselle », yonyo « fils » est remplacé par hanno « frère » comme nom alternatif du troisième doigt et selye disparaît complètement, le quatrième doigt étant dit ne pas avoir de nom alternatif. Comme avec MDN, les « notes de bas de page » intercalées par Tolkien dans le corps du texte ont plutôt été placées dans une section finale « Notes de l’Auteur » séparée et des numéros ont été ajoutés à chaque paragraphe pour faciliter les références croisées.
§1 Le radical du numéral eldarin commun pour 9 était neter, qui ressemble au nom ludique quenya du 4e doigt (en comptage eldarin) : nette, qui est, dans la représentation à deux mains, pouces à l’intérieur, le 9e depuis la G ou la D. Le nom était suffisamment ancien pour apparaître dans les formes apparentées en tel. nette, nettica, sind. netheg. La ressemblance fut observée par les anciens maîtres du savoir (qui citent les formes telerines autrement non attestées) ; mais ce fut rejeté comme étant fortuit, car nette avait un sens approprié uniquement pour les jeux de mains enfantins dans lesquels les doigts étaient représentés comme une famille ou deux familles voisines : il signifiait « demoiselle », mais était un diminutif habituel « familial » de la base eldarine commune NETH (pas NET) « femme » (Note 1-1)58). Les autres numéraux avaient des radicaux qui ne pouvaient être appelés des bases primitives et n’avaient aucune signification excepté le numéro du numéral qui lui était attribué : 4 kan-at, 6 enek, 7 otos59).
§2 La théorie de Pengoloð doit, cependant, probablement être acceptée. Il objecte que la similarité entre nette/neter ainsi que la position de nette comme étant 9 dans la représentation à deux mains ne peuvent pas être fortuites et requièrent une explication. Contrairement à 4, 6 et 7, on peut se référer à une base eldarine commune capable de fournir un sens approprié. Il montre que l’élément adverbial eldarin commun EN « une fois de plus, encore »60), possédait manifestement l’extension en-et. Ceci est observé dans le q. ente « en outre, (de) plus, qui plus est » et dans la forme adjectivale enta « un autre, un de plus »61). Cf. le q. yunquenta 13 (12 et un de plus)62). Une autre forme nete, net était encore communément utilisée en quenya dans l’énumération de séries : habituellement sous la forme 1, 2, (3) nete, nete, nete… (Note 2-1) en se finissant sans conclusion pour décrire une longue série jamais entièrement comptée ou achevée par [un] nombre terminal définitif (a) 1, 2 nete nete 5 (tous les doigts de la main), (b) 1, 2, (3) nete nete … nete 10 (tout, le lot) (Note 3-1)63). Le traitement numérique primitif des doigts était plus ancien que les noms ludiques personnalisés, bien que les deux fussent interconnectés. Dans le traitement numérique, alors que la liste numérique était remplie, nete venait avant 5 ou 10 : un de plus au-delà du doigt proéminent du milieu. Dans la série primitive des noms ludiques « père » (pouce) et « mère » (index) étaient certainement les plus anciens, les autres étant juste des « enfants », bien que le remarquable petit doigt avait peut-être assez tôt un nom = bébé. C’est là que la ressemblance entre net(e) et nette devint effective : nete « un de plus au-delà du milieu » et avant la fin du comptage devint nette « demoiselle/fille » et fit que *tolya « proéminent » devint masculin et généra pour lui-même la variante définie selye « fille » et pour tolyo la variante yonyo « fils » : ainsi la famille fut complète. Hors du jeu de famille, nete dans la représentation à deux mains devint nete le dernier avant 10 et, dans l’organisation des numéraux dissyllabiques (la consonne additionnelle étant probablement, dans tous les autres cas, une imitation de (e)nel-ed) reçu l’ajout d’une dentale distincte r ; l/d, t, s étant déjà utilisés : neter 964).
§3 Bien que compliqué (comme les processus d’invention linguistique le sont) cela semble un compte-rendu raisonnable et probable. Il laisse, bien sûr, « inexpliqués » les véritables radicaux kanat 4, enek 6 et otos 7 ; mais ce n’est pas plus difficile que toute tentative de découvrir comment/pourquoi les équivalents de sens de, disons, er, enel/d, tol en étaient arrivés là. Le transfert de nete(r) à 9, ou plutôt la limitation à cette position, était un élément du processus de construction d’une série de 10 complète. Il laissait un vide à 4. Pourquoi kanat ? La réponse de Pengoloð [est] que c’était une période extrêmement inventive et que le mieux que l’on puisse dire c’est que (1) la sundóma a fut choisie parce que la sundóma e était déjà trop utilisée ; er, nelede, lepem, neter et peut-être déjà dans enek, et o était utilisée dans otos et tolod ; (2) n-t est répété, mais un k fut encore ajouté car la série était, jusque-là, entièrement dentale (excepté là encore dans enek). À l’objection que, tandis que ot dans otos n’avait pas d’autre usage en eldarin commun que 7 (il n’y avait pas de base primitive OT-) et alors que la base TOL avait une référence manuelle appropriée, l’eld. com. KAN signifiait « hurler, héler », etc. ce qui ne pouvait avoir d’intérêt, Pengoloð répondait que (a) nous ne savions par si KAN avait déjà été inventé et (b) kanat ne se heurtait en fait jamais aux dérivés de KAN « appeler » ce qui est probablement suffisant65).
§4 enek 6 ne peut, cependant, pas être entièrement éludé. À une période (probablement) plus tardive, les Eldar, disposant désormais d’un système numéral strictement basé sur les « décimaux » manuels 5 et 10 (Note 4-1), en vinrent à s’intéresser aux six, et un mot pour 6 x 2 (12) fut conçu avant même la fin de la période de l’eldarin commun (puisqu’il apparaît en quenya, telerin et sindarin)66). Mais à une période plus primitive de la main, six était hors d’une main et, sur deux mains, était de D > G [le] pouce G et de G > D le pouce D. Ils étaient trop fermement fixés comme le un (min ou er) (Note 5-1) pour fournir aucun numéral pour 6. Ce doit ∴ être une « invention » (probablement de la même période que neter, kanat, otso). Mais sa ressemblance de forme avec enele/enede67) pouvait difficilement être fortuite en particulier vis-à-vis de enete, puisqu’il avait des relations numériques avec 3 et 9 (3, 3 x 2, 3 x 3). enete (q. ente) fut probablement le plus influent. Dans une représentation à deux mains, en comptant [? vers l’extérieur] du pouce vers le petit doigt, [? puis à nouveau du pouce vers le petit], quel que soit le sens, 6 viendrait après le vide à [la] fin d’une main. NEK « diviser, partager, séparer »68).
Eld. com. ? netthĭ. Eld. com. tth > q., tel. tt ; sind. þþ > þ. nette signifiait « demoiselle approchant l’âge adulte » (dans son « adolescence » : la croissance des enfants elfiques après la naissance était à peine voire nullement plus lente que celle des enfants des Hommes). Le radical eldarin commun (wen-ed) wendē « jeune fille » s’appliquait à tous les stades jusqu’à l’adulte (jusqu’au mariage)69).
Un et deux étaient de très anciens éléments, précédent de beaucoup la création d’une série numérale complète à 10 (ou 12) ; trois était probablement le plus ancien nombre après eux.
Il était admis que [10] devait à l’origine signifier « (tous) les doigts » ; 10 était connu pour être le dérivé du radical kwā « complet, plein, tout, l’entièreté ».
Il demeura ainsi. En dépit de leur intérêt plus tardif [? et théorique] prédominant pour six-douze (comme unités de groupe) et pour son usage, ils ne développèrent pas une nomenclature duodécimale complète, bien qu’ils inventèrent (après la période de l’eldarin commun pour les nombres au-dessus de 12) des noms spéciaux pour les multiples de six x six. De ceux-ci, 18 et 24 étaient aussi d’usage quotidien, ainsi que la « grosse » 144 (12 x 12) et 72 demi-grosse70).
Lorsque l’on levait la main en brandissant le pouce, le pouce était en fait er « un (seul et différent) » ; mais c’était aussi, dans l’ancien comptage à une main, min- « premier de la série ».
Cette explication fut abandonnée en milieu de phrase, au bas de la p. 1 du dactylogramme et biffée à l’encre, puis suivie immédiatement dans le dactylogramme par la version finale du §5 en haut de la p. 2.L’eldarin commun possédait aussi le mot *makwā, à l’origine sans rapport avec *maȝa mais suffisamment similaire pour être facilement substitué à mā — les noms monosyllabiques étaient, dans toutes les langues, une classe en déclin. L’origine de makwā est incertaine et était généralement classée par les maîtres du savoir comme « non-dérivée » : un terme utilisé pour de très nombreux éléments du vocabulaire de l’eldarin commun, développés ou inventés à un stade tardif de son développement (et pour les inventions similaires faites indépendamment dans les différentes branches) ; cela signifiait que ces mots, bien que contenant trois consonnes ou plus
La phrase finale de cette note fut biffée à l’encre et fut à l’évidence abandonnée avant d’être achevée (noter la parenthèse de fermeture et le point manquants). Au moment où cette phrase fut biffée, une note « Voir l’article sur Mains & Doigts » fut ajoutée en regard dans la marge gauche, désignant bien sûr MDN. Les affirmations présentes selon lesquelles « les Eldar estimaient [la main] juste après le visage et la tête » et « le plus ancien nom » désignant « la main entière, y compris le poignet, dans toute attitude ou fonction » sont clairement basées sur les phrases d’ouverture de MDN §1.L’eldarin commun possédait plusieurs mots pour « main » que les Eldar estimaient juste après le visage et la tête. Le plus ancien nom — pour la main entière, y compris le poignet, dans toute attitude ou fonction — était encore en usage dans le quenya má. C’[était] sans rapport avec le suffixe instrumental –mā ou le radical interrogatif MA. Son radical eldarin commun était probablement MAȜA (pas identique mais peut-être apparenté à MAGA « bon — pour un but ou une fonction, utile, intact », etc.) ; cf. q. mahta- « manipuler, manier, s’occuper de, gérer ». Il n’a pas survécu comme mot indépendant en telerin et en sindarin, mais fut remplacé par l’eld. com. homophone mais sans rapport makwā, q. maqua, tel. mapa, sind. mâb (d’origine incertaine, mais probablement à l’origine une formation adjectivale de MAK « frapper »
Là, une distinction est faite entre un pronom personnel relatif ye, pl. i « qui » (cp. i hárar « ceux qui sont assis sur », CLI, p. 342) et un pronom impersonnel relatif ya « que » (cp. yassen « dans lequel », FdA, p. 476). Ces pronoms sont suivis de deux exemples, dont le second est yeo / yello / ion / illon camnelyes « de qui vous l’avez reçu ». Les quatre premières formes de cette phrase signifient toutes « de qui » : le gén. partitif sing. yeo, l’abl. sing. yello, le gén. partitif plur. ion, l’abl. plur. illon. La forme camnelyes « vous l’avez reçu » doit être constituée du pas. camne « avoir reçu » + pron. sujet –lye « vous » + pron. objet –s « lui » (cp. utúvienyes « je l’ai trouvé », RR, p. 297). La seule autre forme quenya au passé à terminaison en –mne dans le corpus publié est tamne, passé de tamin « je tape » s.v. TAM- « cogner », qui suggère que camne est issu de *cam- « recevoir » (= KAM dans la note « kamba est issu de KAM pas de KAB ». Tolkien assigna à la base KAM une grande variété de significations au fil des ans ; voir la discussion sur ocama dans VT 44, p. 13–14).qui rel. per. ye, pl. i
que rel. imp. ya
yenna leltanelyes « auquel vous l’avez envoyé »
yeo / yello / ion / illon camnelyes « de qui vous l’avez reçu »
Les doigts. Les 5 « doigts » incluaient le pouce. Le mot eldarin commun était *leper-†, un dérivé de l’eld. com. LEP « ramasser, choisir avec les doigts » ; q., tel. lepta- « doigt, ressentir avec le bout du doigt ». D’où q., tel. leper, plur. leperi ; sind. leber, plur. lebir. Cette forme plus complète était cependant un développement plus tardif. Dans la période primitive où la dénomination des doigts et le développement du comptage par assistance des mains se déroulèrent en même temps, le radical basique simple apparu. L’une des plus vieilles formes était évidemment l’eld. com. lepem‡. Elle resta en usage après que *leperī fut devenu le pluriel usuel « doigts » et devint le mot pour 5 sc. (tous) les 5 doigts d’une main. La forme pour 5 était en telerin lepen, sind. leben et q. lempe. Puisque le -m final de l’eldarin commun devint -n (avec le même développement subséquent en n dans les langues dérivées), il apparaît que lepen, désormais plutôt considérée comme une formation plurielle, prit la forme lepenē sur le modèle des autres numéraux 3, 4 6, 7, 8 et 9 qui, dans la forme finale de la numération décimale de l’eldarin commun, avaient tous, dans leur formes complètes, des formes trisyllabiques comme nel se terminant par une sundóma courte ou longue étendue : tel nel-edē 3. Le q. lempe est issu de *lepenē > *lepnē avec une syncope en quenya > lempe avec une transposition en quenya ; sind. leben est issu de lepenē ; tel. lepenē̌bien qu’il pourrait être < lepem d’origine qui est probablement < lepenĕ.
Ici, l’affirmation du texte dactylographié que « le -m final de l’eldarin commun survécu tel quel en telerin, mais comme n en quenya, et fut perdu en sindarin » est remplacé par « le -m final de l’eldarin commun devint -n (avec le même développement subséquent en n dans les langues dérivées) ». Ce changement éclaire pourquoi l’eld. com. lepem devint lepen avant d’être étendu en lepenē : le -m final > -n était un développement phonologique normal de l’eldarin commun. La phrase finale de la révision, « ; tel. lepenē̌bien qu’il pourrait être < lepem d’origine qui est probablement < lepenĕ » est quelque peu curieuse — puisque, selon la phrase précédente, le lepem original était déjà devenu lepen en eldarin commun, il semble n’y avoir guère de raison de supposer que le tel. lepen ait été dérivé du lepem d’origine.† Probablement une formation agentive : *lepero (les voyelles courtes non accentuées e, a, o furent perdues en eldarin commun dans les mots de plus de 2 syllabes, après l, r, m, n) ; cf. *abaro « récusateur » > eld. com. abar : q., sind. avar, tel. abar le nom donné par les Eldar aux autres Quendi qui avaient refusé l’invitation des Valar.
‡ Utilisant l’affixe pluriel de l’eldarin commun primitif -m (? de l’ancien –me bien que n’ayant désormais pas de lien discernable avec d’autres éléments indiquant la pluralité, à moins que ce ne soit le radical me qui ait été finalement intégré au système pronominal).
q. tolpe « pouce » et tolyo le nom ludique du lepende ou majeur, contenaient tous deux la racine TOL « dépasser ou se dresser ». Elle était utilisée pour les objets ou les formes (relativement) plus larges ou épaisses, dont la fin ou l’extrémité était un mot formé à partir de TIL « pointe » (q. tilma ou tile)†. Cf. q. tolle « une île », appliqué à celles qui émergeaient de l’eau brusquement, avec des pentes abruptes. C’était utilisé dans la forme Tol comme préfixe au nom d’une île : comme dans TolEressea. De même en sindarin : cf. Tol Brandir.
Le q. tolpe pourrait être considéré comme une invention, avec une référence au radical tol + un autre élément consonantique, bien qu’en fait il ne soit pas dérivé d’un radical étendu eldarin commun‡. Dans ce cas, pe est clairement une réminiscence de lepe et tolpe peut être considéré comme une forme compacte de tol-lepe. Le mot telerin était tolmo, une forme agentive ou personnalisée de tolma : cf. les formes personnalisées des noms ludiques des doigts en quenya. (Il n’y en a pas de traces en telerin et, dans les textes en quenya, ils n’apparaissent pas en-dehors des vocabulaires et notes étymologiques des maîtres du savoir. Pour les formes en sindarin, voir ci-dessous.)
Les corrections suivantes furent apportées à cette section de 6A : « q. tolpe “pouce” » > « q. tolbo “pouce” » (dans le premier paragraphe seulement ; voir la discussion ci-dessous) : « TOL “dépasser ou se dresser” » >> « TOL “se dresser, être debout (raide), relever la tête” » ; « Le mot telerin était tolmo, une forme agentive ou personnalisée de tolma » » « Le mot telerin était nāpo, une forme agentive (personnalisée) dérivée de NAP “saisir” ».† La différence entre tilma, tile et inga était que les premiers pouvaient pointer dans n’importe quelle direction, mais inga était seulement utilisé pour les formes pointant vers le haut et signifiait « sommet » ; et alors que til- était habituellement utilisé pour les terminaisons notablement plus fines et aiguisées que le radical, inga faisait d’abord référence à la position et pouvait être utilisé pour des sommets relativement larges. Ainsi, q. orotinga « cime de montagne », aldinga « cime d’arbre » contrastent avec nortil, l’un des mots pour un cap (de terre), seulement utilisé pour les extrémités de promontoires ou autres projections vers la mer qui était relativement aiguisées ou pointues.
‡ Cf. aussi la forme régulière tolma « une protubérance aménagée pour servir un but précis, bouton, courte poignée arrondie », etc. tolbo « une souche, un moignon (comme pour un membre ou une branche tronqué).
La variation entre d et l en eldarin commun est aussi mentionnée dans 7A et 7B, bien qu’aucun exemple ne soit cité ici, hormis ened/enel. L’assertion selon laquelle les Nandor étaient d’origine noldorine contredit les autres comptes-rendus ultérieurs dans lesquels les Nandor sont censés être une branche des Teleri. Voir les Annales Grises, entrée pour l’année 1350, qui dit comment Dân, de la troupe telerine d’Olwe, emmena de nombreuses personnes qui devinrent les Nandor (WJ, p. 13) ; et Quendi et Eldar, qui affirme que le nom Nandor « doit avoir été créé au moment où, dans les jours anciens de la Marche, certains groupes de Teleri abandonnèrent la Marche » (WJ, p. 384).d et l s’inter-changeaient fréquemment en eldarin commun primitif, comme exemplifié par Dat/Lat « tomber (au sol) ». Il est établi par les Maîtres du savoir qu’en nandorin, la langue désormais presqu’entièrement perdue des Nandor (appelés plus tard Elfes Verts) d’Ossiriand, enel signifiait « au milieu, entre ». Le quenya a sans doute préservé une trace de cela dans enel, lepenel : les Nandor étaient, à l’origine, un détachement de Noldor égarés qui n’entrèrent en Beleriand que peu de temps avant la période exilique.
Les exemples de cette préposition de MDN semblent se conformer à l’usage imbe/imbi décrit dans l’essai sur la comparaison. Dans MDN, le singulier imbe « entre » est utilisé lorsqu’il est suivi d’un nom explicitement duel (imbe met, imbe siryat) et le pluriel imbi est utilisé (avec le sens « entre » plutôt que « parmi ») lorsqu’il est suivi par deux noms au singuliers liés par « et » (imbi Menel Kemenye).imbĕ < imbĭ est une forme renforcée de √imi « dans, parmi » donnant la préposition mī > mĭ « dans ». En forme absolue, le sens « entre deux choses », où celles-ci ne sont pas nommées, est exprimé par la forme dualisée imbit. Au sens de « parmi » devant des pluriels, elle est habituellement pluralisée > imbi même quand un nom pluriel suit.
Le q. yé « voyez ! » apparaît dans l’exclamation d’Aragorn lors de la découverte d’un plant de l’Arbre Blanc sur le Mindolluin : Yé ! utúvienyes ! « Je l’ai trouvé ! Voyez ! » (RR, p. 297). La glose additionnelle de yé comme « maintenant voyez ! » suggère un lien avec la racine primitive DYĒ(1) dans le QL, d’où ʼyēta « regarder » et ʼyesta, ʼyendo « coup d’œil, regard ». Les deux formes équivalentes kena, tira (ce dernier corrigé en tíra) doivent toutes deux également signifier « voit ! » ; cp. ken- « voir, apercevoir », tiruva « remarquera » (M&C, p. 274–275). Grammaticalement, le q. –ye ressemble à la particule copulative latine –que « et » (PIE *kwe, d’où aussi le grec te en le sanscrit –ca), comme dans la célèbre devise Senatus Populusque Romanus « Le Sénat et le Peuple de Rome ».-ye « et » ajou[té] au second d’une paire (sing. plur. — duel). En q. toujours normalement utilisé pour les paires habituellement associées comme le Soleil, la Lune ; le Ciel, la Terre ; la terre, la mer ; le feu, l’eau ; etc. [? C’est phonétiquement] une conj. Mais dans l’usage général, remplacée par ar (as) > √asa « à côté de ». Semble remonter à l’eld. com. ? As donne aussi en sind. « et » a, etc. En sind. ye- est perdu, mais en tel. ye pouvait être utilisé habituellement dans des paires ou préfixé [? sep.] et apparait avant chaque élément d’une liste. Ce ye est probablement apparenté au yé « voyez ! » — (maintenant voyez !) = kena, tira. Aussi en q. yē ou yea « Qui plus est ».
Suit une note :D’autres relations entre les noms des doigts et les numéraux peuvent être établies, bien que moins certaines. Elles appartiennent au second stade : l’usage des deux mains. Qu’elles fussent collées pouce à pouce, comme décrit ci-dessus, est indiqué par quelques noms ludiques en quenya et sindarin.
Les relations entre les autres noms des doigts et les numéraux sont censées être « moins certaines », bien que la relation entre le numéral 8 et tolyo, nom ludique pour le majeur, soit dite « assez probable » plus tard dans 7A. La note du passage ci-dessus sur les noms ludiques en telerin reprend, presque mot pou mot, une affirmation faite dans le passage de 6A cité dans la note de l’éd. 36 : « Il n’y en a pas de traces en telerin et, dans les textes en quenya, ils n’interviennent pas en-dehors des vocabulaires et notes étymologiques des maîtres du savoir. » Cependant, cette idée que les noms ludiques en telerin ne fussent pas consignés ne devait apparemment pas survivre ; voir note de l’éd. 44.Il n’y en a pas de traces en telerin ; ils n’interviennent pas non plus dans les textes en quenya en-dehors des vocabulaires et notes étymologiques des maîtres du savoir ultérieurs (préservés de façon fragmentaire).
Dans la liste des noms ludiques des enfants de MDN §18, le pouce est appelé atya « papa » plutôt qu’atyo ; ELN donne, de même, atya. Cependant, les Notes d’ébauche possèdent une note isolée qui affirme « Changer les noms : altérer en atyo, amye » (amye est ici une proposition de remplacement pour emya « maman », nom ludique pour l’index à la fois dans MDN et ELN).Ainsi le nom ludique quenya tolyo était une abréviation (pour aller avec atyo) de tolod-, sa relation avec ce dernier étant acceptable car il décrit la forme du majeur et n’est pas, à l’origine, lié aux noms plus fantaisistes des doigts en tant que personnes.
Un compte-rendu étymologique différent pour nette apparaît dans une note contemporaine trouvée dans « Quenya C » dans « Quelques réflexions sur le q. », un dactylogramme placé avec « Variation D/L en eldarin commun » et également tapé sur du vieux papier Allen & Unwin daté de 1968. La note, écrite à l’encre en haut d’une page (et n’ayant aucun lien thématique avec le texte dactylographié de la demi-page inférieure) commence par : « √net. neter 9. nom de doigt nette. nette = petite fille (sind. neth). √net svelte (joli, délicat) : netya- garnir, orner, netya joli, délicat, q. netil colifichet, [?petit objet] de parure personnelle ». Ce groupe de formes est suivi du diagramme d’une main (reproduit ici) indiquant les positions des doigts nette/selye, censé être les neuvièmes dans le comptage à deux mains « de droite à gauche ou vice-versa » et de tolyo, qui « est, de même, huit (*tolot) » (tolyo est suivi par deux mots qui pourraient se lire « gros garçon »). La note se conclut sur une liste de racines pour « homme » et « femme » et leurs dérivés :La base NETH signifiait probablement « frais, vif, joyeux », même s’il possédait une association particulière avec les jeunes femmes : cf. l’adj. *nēthā, tel. nēþa « gai, vif, efféminé » (introuvable en quenya, sindarin) subs. *nēthē « demoiselle ». La forme en eldarin commun de nette était probablement netthi, tel. nette, q. nette, sind. neth, montrant le développement normal du tth dans chacune d’elles. En sindarin, seul le diminutif nethi était utilisé dans le jeu de mains ; Pengoloð cite à la fois nette et un dimin. nettice en telerin.
Cette note de « Quenya C » fait écho à deux concepts antérieurs observés à la p. 7A de MDN : que nette signifie « demoiselle » et que selye était un nom alternatif du quatrième doigt. Ces deux idées furent rejetées en 7B, dans laquelle nette signifie « sœur » et où il est affirmé qu’il n’existe pas d’alternative (voir note de l’éd. 47). Cependant, à la différence de 7A et 7B, qui font toutes deux dériver nette d’une base NETH et affirment qu’elle « ne contient pas le radical eldarin commun NET », la note de « Quenya C » fait dériver nette « petite fille » (et plusieurs autres noms en quenya) de √net « svelte (joli, délicat) ». Cela semble être un concept antérieur aux étymologies données dans 7A et 7B et qui sous-tend l’affirmation faite dans les Notes d’ébauche que nette signifie à l’origine « jolie petite chose », mais devint plus tard un mot pour « petite fille ». La note de « Quenya C » semble impliquer que neter 9 était aussi dérivé de la même racine √net, bien que le lien de sens ne soit pas du tout clair, à moins que nous devions supposer qu’il soit dû au 9 tombant sur l’« annulaire » dans le comptage à deux mains (cp. netya- « garnir, orner », netil « colifichet »). La note glosant nette comme « jolie petite chose » mentionne aussi neter, mais dit seulement que « ler est de signification inconnue, quand bien même il en aurait eu une ? » Le radical nerd- dans nerdo « homme grand, fort » pourrait aussi apparaître dans le nom de l’épouse de Fëanor Nerdanel. Le nom Nerdanel apparaît pour la première fois dans un passage ajouté à la Quenta Silmarillion plus tardive (apparemment quelque part à la fin des années 1950 ; voir MR, p. 199, 300), où il s’agit d’une correction du Istarnië initialement tapé. Ce passage décrit Nerdanel comme « forte et libre penseuse, et emplie du désir de connaissance », ainsi que d’une « volonté de fer » ; de son père Mahtan le forgeron, elle « apprit de nombreux arts que les femmes des Noldor utilisaient rarement : le façonnage d’objets en métal et en pierre. » Ainsi l’élément nerd- dans Nerdanel pourrait se référer à sa force de corps et d’esprit ainsi qu’à son activité d’arts plus communément pratiqués par les hommes. (Le nom originel de Nerdanel, Istarnië, doit être basé sur le q. ista « savoir », en référence à son « désir de connaissance ».).Eld. com. √NER mâle, homme √nis- ? niss-, niþ ?
nerd- niss
nerdo homme grand, fort nisse femme
[nerkĭ >>] nerke petit homme nisto grande femme
nill- petit
Le point désigné par (b) ci-dessus est que « les noms ludiques (faisant des mains deux familles) bien qu’anciens, étaient plus tardifs et moins figés que les numéraux, desquels ils dépendaient plutôt que d’en être la source ». Le paragraphe final de 7A finit, apparemment, au milieu d’une phrase (il n’y a pas de ponctuation finale) au bas de la page et sans non plus énumérer les points que Pengoloð considérait avoir été négligés par ses prédécesseurs.Ces arguments pouvaient sembler concluants. Pengoloð était en désaccord avec la conclusion, bien qu’il admettait leur force, en particulier (b). Il disait que l’occurrence à la place 9 attendue de deux formes aussi similaires que nette, neter pouvait difficilement être un simple accident et requérait une explication. Plusieurs points avaient été négligés. 1. Dans la liste des noms ludiques, nette/selye comme noms du 4e doigt offraient un parallèle à tolyo/yonyo : i.e. nette allait avec tolyo et n’était probablement pas (à l’origine) personnel, mais une description d’un doigt par sa position ou sa forme. Les critiques soulignent le fait que 4, 6 et 7 sont (ou semblent désormais être) « de simples inventions ».
En bas de la page, sont écrites trois notes additionnelles : « q., tel. calca verre » (cp. gn. celc « verre » dans GL), « LAP plier, courber » (cp. LAPA « envelopper » dans QL) et « T.S.V.P. » (cette dernière étant une direction vers la note sur –ye « et » écrite de l’autre côté de la feuille). La note sur calca « verre » relie encore plus cette page à MDN, car les Notes d’ébauche contiennent une note isolée presque identique : « q., tel. calca « verre » < KALAK- » (sans indice sur la façon de l’appliquer à l’essai).Monosyllabiques en eld. com. cons. + voyelle
Toutes les combinaisons de consonnes initiales seules ou cbn. permises + toute voyelle (excepté que w/y étaient prohibées avant u/i) interviennent en eld. com.
Mais ce fut principalement [? dans ce cas] réservé (a) aux radicaux pronominaux, en particulier les dentales t, s, th, (n) ; et y. (b) aux [? usages prépositionnels] adverbiaux comme gō « (issu) de », nē [? « puis] avant ». (c) à l’exclamation, comme phū excl. de répugn. [? D’autres] noms furent créés seulement par additions dérivatives.
Les noms sans de telles additions étaient peut-être même primitivement exceptionnels et, dans tous les cas, peu ont survécu ou laissés [? des traces] décelables. Il s’agissait de pē « lèvre », pū ?, phā « respiration, bouffée d’inspiration », pī [« petit oiseau » »] « petit insecte, mouche », mā « main », mō « personne », mbā « mouton », sū « vent », skū ?, skā ?, kā « foyer, maison », ñ(g)ā « terreur, chose terrible », [biffé : lō ?,] lū « arc », srā « corps », [biffé : wā(w) chien,] grā [« ours » »] « chien ».
pē, phā, pī, mbā, mō, sū étaient prob. des noms à l’origine. mā [? probablement] mais aussi p-ê. < maȝa. kā, srā, grā montrent tous une perte de –w : kāw(з) > kā ou furent peut-être plus tard étend[us] en kawa, srawa, grawa (q. koa « maison », hroa « corps », roa « chien »). lû prob. < luȝu ; cf. luhta arquer. [? à l’orig.] mā < maȝa.
De ceux-ci, pē, fā, pī, sū, *kā, *hrā et *lū survécurent en q. mais ceux marqués * furent [? doublés ou étendus.]
pē̌pe, fawa foa, mbāba [? mbava] en q. māma.
sū seulement utilisé pour le son du vent ; comme nom + r/l : sūli, sūr(i).
Les plur. 2 *imde et 3 *imte sont marqués avec des astérisques comme des formes primitives « hypothétiques ». Le sing. 1 imni n’est pas marqué avec un astérisque et donc est probablement une alternative à imne plutôt qu’une forme étymologique (cp. le sing. 1 óni dans la table des ó- « avec » fléchie avec les pronoms enclitiques donnés dans VT 43, p. 29). La forme sing. 3 imse fut ajoutée au-dessus à droite de inse et pourrait être soit une alternative, soit une forme étymologique.S. 1 imne] imni Pl. 1 a imme
2 a intye b inwe
b imle 2 inde, *imde
3 inse, imse, insa 3 inte, *imte
Ce concept, que le sind. cened reflète l’ancienne forme de l'eldarin commun tandis que kanat serait une modification tardive faite en ancien quenya pour éviter « la monotonie du e » dans la série numérique, est réitéré dans les Notes d’ébauche :Faire tel., sind. cenet, cened. La forme sindarine cened est habituellement considérée comme étant a > e sous l’influence du voisinage de neled 3, lepen 5, enek 6. Mais elle pourrait être une forme plus ancienne, kanat [? étant différenciée] de façon délibérée en ancien quenya pour ôter la monotonie du e. Si c’est [le cas], kenet semblerait être basé sur (e)net.
Cependant, le tel. cenet et le sind. cened semblent avoir été des concepts éphémères — ELN, qui fut écrit après MDN, donne tel. canat et sind. canad 4 et l’essai contemporain « Les Rivières et collines des feux de Gondor » donne également tel. canat, sind. canad 4 < kanata (VT 42, p. 24).La base kan + at n’a pas de lien avec les noms des doigts. La √KAN signifie « hurler », avec un large développement des sens (similaires à ceux du germ. hait-) : « appeler (convoquer, nommer), commander, exiger ». Elle n’a pas de connexion avec 4, du moins aucune qui puisse être perçue désormais. Mais les sind., tel. avaient KENET, probablement la forme plus ancienne ; soit le q. altéra KENET en KANAT puisque la sundóma E était sur-utilisée, soit les sind., tel. altérèrent KANAT en KENET sous l’influence de neled, lepe, enek, etc. Dans [le] premier cas (plus probable) kenet était évidemment un nombre basé sur enet (voir neter) par addition d’un K (utilisé car les autres numéraux étaient principalement tous dentaux.