J.R.R. Tolkien — Décembre 2005
édité et annoté par Patrick Wynne
traduit de l’anglais par Vivien Stocker
Cet article est issu du journal linguistique Vinyar Tengwar 48, daté de décembre 2005 et édité par Carl F. Hostetter. Le traducteur remercie chaleureusement le Tolkien Estate, Patrick H. Wynne, Carl F. Hostetter et l’équipe éditoriale de Vinyar Tengwar pour avoir autorisé la publication de cette traduction. Il remercie également les nombreux relecteurs de la traduction.
Le texte de Tolkien est sous la protection du droit d’auteur. © 2005–2022 The Tolkien Trust. |
Plan de l’article :
Mains, doigts & numéraux eldarins et écrits associés
e manuscrit de trois pages, sans titre, placé après le dactylogramme de « Mains, doigts et numéraux eldarins » (MDN), fut écrit par J.R.R. Tolkien avec un stylo-plume, apparemment le même que celui utilisé pour écrire « Neter, Kanat, Enek » (NKE) et le texte révisé de MDN §15 (voir l’introduction à NKE, VT 47, p. 14). Le manuscrit présente « l’abrégé d’un curieux document » intitulé « Eldarinwe Leperi are Notessi », « Les doigts et numéraux elfiques », attribué au célèbre maître du savoir linguistique Pengoloð de Gondolin. Cet ouvrage de Pengoloð est aussi mentionné dans MDN, qui note que « sans sa survivance fortuite, nous ne saurions rien des jeux de mains ni des “noms de famille” des doigts, qui apparaissent rarement dans les textes en quenya » (VT 47, p. 14 n. 19).
Le synopsis d’ « Eldarinwe Leperi are Notessi » (ci-après ELN) est clairement postérieur à MDN, puisque de nombreux mots elfiques émergeant seulement dans MDN comme des corrections de formes plus anciennes apparaissent dans ELN comme étant celles ayant été écrites en premier : 1) Dans MDN, le mot quenya pour « pouce » était originellement tolpe, corrigé en nāpo ; dans ELN q. nāpo est la forme écrite en premier. 2) Les noms ludiques en quenya pour le pouce et l’index dans MDN étaient originellement (a)taryo « papa » et (a)milye « maman », corrigés en atto/atya et emme/emya ; ELN a atto, atya et emme, emya comme formes écrites en premier. 3) Dans MDN §18, le nom ludique tolyo du 3e doigt a l’alternatif yonyo (grand garçon), mais qui est remplacé par hanno « frère » à la fin de l’essai (§24) ; dans ELN, le nom alternatif du 3e doigt est directement hanno. 4) Dans MDN §18, le nom de jeu du 4e doigt est nette « demoiselle » avec l’alternative selye « fille », mais à la fin de l’essai (§24) la signification de nette est changée en « sœur » et il est dit n’avoir aucune alternative ; dans ELN, le 4e doigt est appelé nette « sœur », sans autre alternative. 5) Dans MDN, les noms de jeu telerin et sindarin du 4e doigt étaient originellement tel. nettica, sind. netheg, corrigés en tel. nettice, sind. nethig ; ELN a le tel. nettike et le sind. nethig comme formes écrites en premier.
Les corrections faites au manuscrit sont peu nombreuses et la plupart ont été incorporées silencieusement dans le texte présenté ci-dessous, bien que tous les changements dans les formes elfiques soient cités dans les notes éditoriales. Les notes de bas de page de Tolkien (qui, dans ce cas, furent inhabituellement écrites au bas des pages) ont été réunies en une section de notes de l’auteur à la fin du texte et les numéros de paragraphes ajoutés par l’éditeur. À la suite d’ELN, il y a deux appendices : l’appendice A présente quatre brefs textes sélectionnés parmi les Notes d’ébauche concernant l’étymologie du q. enque 6, minque 11 et yunque 12 ; l’appendice B présente une note tardive sur les fractions en quenya qui se trouve dans « Quenya C ».
§1 Les doigts. Les 5 « doigts » incluaient le pouce. Leur dénomination est d’un intérêt considérable, puisqu’il est relié au développement des numéraux 1 ‒ 10, la base du système décimal eldarin, et qu’il donne aussi, dans les « noms ludiques », un aperçu des enfants eldarins1) que les légendes et histoires ne fournissent pas.
§2 Les nombres 1, 2 : un (seul ou premier) et deux (un autre ou le suivant) étaient probablement les plus anciens et n’étaient, à l’origine, pas nécessairement reliés aux doigts : bien que le pouce, plus large, diffère par sa forme et sa fonction des autres et est capable d’être étendu sur le côté, de sorte qu’il est seul et distinct, et tandis qu’il peut aussi être mis le long des doigts élancés et être le premier d’une série, il est éminemment adapté au développement de deux radicaux distincts : (a) un, seulement, seul et (b) un, premier (Note 1)2).
§3 Pour utiliser les mains comme aide au comptage (et à l’enseignement du comptage), elles étaient mises à plat avec les pouces se touchant. Le comptage, et la dénomination, procédaient alors depuis le pouce vers le petit doigt (quelque soit la direction) et, en revenant au milieu, continuaient depuis le second pouce. Chaque nom intervenait ainsi deux fois et, dans le calcul à deux mains, avait deux places numériques, la seconde étant + 5. Donc une relation entre des numéraux séparés de cinq, par exemple 3 et 8, ne serait pas surprenante — dans la mesure où l’on peut montrer que les numéraux possèdent des relations étymologiques avec les noms des doigts intervenant aux places appropriées (Note 2).
§4 Le compte-rendu suivant est l’abrégé d’un curieux document, préservé dans les archives de Gondor par un hasard étrange (ou par beaucoup de ces hasards) depuis les Jours Anciens, mais suivant une copie apparemment faite à Númenor peu de temps avant sa chute : probablement par ou sous les ordres d’Elendil lui-même, alors qu’il sélectionnait de telles archives qu’il pouvait espérer entreposer pour le voyage vers la Terre du Milieu. Celle-ci devait sans doute sa sélection et sa copie, d’abord à l’amour d’Elendil lui-même pour les langues eldarines et pour les œuvres des maîtres du savoir qui écrivirent leur histoire ; mais aussi au contenu inhabituel de ce traité en quenya : Eldarinwe Leperi are Notessi : Les doigts et numéraux elfiques3). Elle est attribuée, par le copiste, à Pengoloð (ou Quendingoldo4)) de Gondolin (Note 3), et il décrit les noms ludiques elfiques des doigts tels qu’enseignés et utilisés par les enfants. Il expose les noms des doigts normaux ou adultes, les noms ludiques et les numéraux (de 1 ‒ 12) en quenya, telerin et sindarin, avant de discuter leurs origines et relations ; comme suit (Note 4) :
§5 Les doigts. Les 5 « doigts » incluaient le pouce. Le mot eldarin commun pour « doigt » était leper, pl. leperī : q. tel. leper, pl. –i ; sind. leber, lebir.
§6 Ils furent nommés depuis le pouce (1) jusqu’au petit doigt (5) : (a) en quenya 1. nāpo, 2. tassa, lepetas 3. lepenel, 4. lepente ou lepekan, 5. níke ou lepinke5) ; (b) en telerin 1. nāpa, 2. tassa, 3. i nellepe, 4. nente, 5. níke6) ; (c) en sindarin 1. nawb, 2. tas ou lebdas, 3. lebeneð, 4. lebent, 5. niged ou lebig7). En plus, il y avait une formation duelle désignant le pouce et l’index comme une paire : q. nāpat, tel. nāpat, sind. nobad8).
§7 Dans le jeu de mains des enfants, chaque main était considérée comme une « famille » de 5 : père, mère, frère, sœur et petit ou bébé. Des contes furent faits à propos de cette famille, leurs relations familiales et aussi, lorsque deux mains étaient juxtaposés, leurs relations avec la famille voisine ; certains basés sur la tradition et d’autres souvent improvisés. Il y eut plus de variations dans ceux-ci que dans les noms adultes, mais les suivants étaient les plus connus :
1. (pouce) Q. atto, atya ; 2. emme, emya ; 3. tollo ou hanno9) ; 4. nette ; 5. wine ou winimo, win(i)ke10) (Note 5).
1. Tel. atta(ke) ; 2. emme(ke) ; 3. tolle ou hanna(ke) ; 4. nette ou nettike11) ; 5. winike (winke, pinke)12).
1. Sind. atheg13) ; 2. emig14) ; 3. tolch, toleg, honeg ; 4. (neth), nethig ; 5. niben15), gwinig.
§8 Q. 1. er, min. 2. atta16). 3. nelde. 4. kanta. 5. lemen17). 6. enque. 7. otso. 8. toldo. 9. nerte. 10. quean (quain)18). 11. minque. 12. yunque19).
Tel. er, min. tat20). nelet (neled-). canat. lepen. enec. otos. —21). neter. pai(n). minipe. yūnece22).
Sind. er, min. tad. neleð. canad. leben. eneg. odo(g). toloð. neder. pae. minib. ýneg23).
Les noms effectivement attestés pour le pouce et l’index n’ont, cependant, aucune relation avec les numéraux pour un, deux.
Une telle relation est visible dans [le] cas de 3 et 8 ; tandis que 5 est certainement apparenté aux mots pour « doigt »24).
Réputé être le plus grand des Lambeñgolmor (maîtres du savoir linguistique) avant la fin des Jours Anciens, à la fois par talent et par opportunité, puisque lui-même avait connu le quenya (vanyarin et noldorin) et le telerin, et conservait une remarquable mémoire, même parmi les Eldar, des travaux (en particulier sur l’étymologie) des anciens maîtres du savoir (y compris Feanor) ; mais avait aussi, comme Exilé, été à même d’apprendre les différents types de sindarin, le nandorin et avait quelque connaissance du khuzdûl dans sa forme archaïque telle qu’usitée dans les demeures des Nains de l’Ered Lindon25).
Donnée ici en transcription ; le telerin étant orthographié comme le quenya26).
Pengoloð les donne sous leur forme en quenya archaïque précédant le changement du w (dans la plupart des cas en v).
omme décrit dans l’Introduction, plusieurs pages des Notes d’ébauche placées avec MDN montrent Tolkien essayant de travailler sur la relation entre les numéraux quenya enque 6, minque 11 et yunque 12, et sur l’origine de leur terminaison commune –que. L’écriture manuscrite de ces pages est globalement difficile, Tolkien griffonnant en grande hâte de nouvelles idées évoluant rapidement, écrivant non seulement sur le verso vierge de notices de publication d’Allen & Unwin, mais faisant également souvent usage des espaces vierges disponibles sur les faces imprimées. Cet appendice présente les plus cohérentes et lisibles de ces notes, avec un nombre assigné à chaque texte et suivi d’un commentaire.
[…] intriguait les premiers chercheurs. Pengoloð indiqua que minque était la clé. C’était évidemment un ancien mot pour 11, le début (premier) d’une nouvelle décade, [? un autre] min. Cela devait ∴ avoir signifié quelque chose comme « encore min », un autre min. Pengoloð suggéra qu’il contenait le radical eld. com. KEWE « neuf, frais », également « à nouveau, répété ». L’adj. *kēwa apparaît dans le q. kéva « frais, neuf », tel. cēva, sind. cîw, mais il avait aussi la forme [*kwē »] (e)kwē̌ « de, à nouveau » ou keu- comme dans le q. keuta, tel. ciuta « renouveler, rafraîchir ». [Q. keura « renouveau » »] Q. keure « renouvelé », [tel.] ciure, [sind.] cýr. Cf. le sind. cýrawn, cýron « nouvelle lune » < ke rānă, tel. ciurān-, q. keuran- ; keuranar « soleil neuf après le solstice ».
D’où selon Pengoloð min(i)k(e)we > sind. minib, tel. minipe 11 (minikwē̌) ; q. minkwe. De son voisin minkwe, le q. yunke [? adopta] yunque, [? d’où] un usage de minque principalement dans les duodécimaux/sénaires — et l’ [? association] de que avec ce système était si forte que eneke, enke > enque.
Ce texte donne le compte-rendu le plus développé sur enque, minque et yunque que l’on trouve dans les Notes d’ébauche. Il commence en milieu de phrase en haut d’une page et la première partie de la discussion — en considérant que Tolkien ne commença pas simplement ce paragraphe in medias res — est désormais perdue. « intriguait les premiers chercheurs. » était clairement l’origine étymologique du suffixe numérique –que et sa distribution dans la séquence de comptage. On rencontre ici le radical eld. com. KEWE « neuf, frais » pour la première fois. Ailleurs dans les Notes d’ébauche, une autre liste de dérivés de kewe « neuf, frais » comprend à la fois le q. keu et kéva (tel. céva, sind. cíw) et le sind. cýr « frais, neuf », suivi par ce qui semble être des verbes dérivés : cýra « renouveler », tel. ceura (corrigé de ciura), ciúra. Au bas de la même page sur laquelle le texte I apparaît se trouve une table des diphtongues en eldarin commun et leurs développements ultérieurs en quenya, telerin et sindarin. Tolkien écrivit probablement cela dans le but de clarifier les développements vocaliques croisés dans les mots apparentés tels que le q. keure « renouvelé », tel. ciure, sind. cýr :
Eld. com. ei, ai, oi, ui ou, au, eu, iu | Q. í (ē)v, ai, oi, ui ū (ō), au, eu, iu ē après i̯, y ō après u̯, w | [Tel.] ē, ai, ui, ui > ō, au, iu, iu | [Sind.] ē > ī, ae, ui, ui ō > ū, aw, iu, iu v ȳ |
Le signe d’insertion suivant « í (ē) » sur la première ligne des développements du quenya indique où s’applique la note « ē après i , y » au bas de la table ; de même, « ō [après] u , w » doit se référer au développement de (ō) sur la seconde ligne des voyelles du quenya. Le symbole « v » sous « iu, iu » dans les équivalents en sindarin n’est pas un point d’insertion, mais indique plutôt que l’ancien sind. iu (qu’il vienne de l’eld. com. eu ou iu) devint ȳ.
eneke min(i)kewe > eld. com. tardif minikwē yū-(e)nekē √KEW *kēwā neuf, frais, renouvelé keu-rā keule | Q. *enke, tel. enec(e), sind. eneg. Q. minque, tel. minipe, sind. minib. Q. *yuñke, tel. yúnec(e), sind. yneg, yneb, inib. Q. *yunke > yunque d’après minque, puis enque d’après yunque. Q. kēva Tel. cēva Sind. cîw keura ceura cŷr keule ceule cŷl keuta [? aussi] kwe |
Le texte II présente des informations similaires à celles données dans le texte I, mais arrangées sous forme de tableau. Plusieurs variantes de l’eld. com. eneke 6, min(i)kewe 11 et yū-(e)nekē 12, différant dans la syncope et dans la longueur de la voyelle finale, apparaissent ailleurs dans les Notes d’ébauche — cela inclut enekwē̌, min(i)kewē̌, minikwe (glosé « (le) frais »), minkwē, yūnek et yū-enekē. Les numéraux en quenya, telerin et sindarin du texte II s’accordent avec ceux donnés dans ELN §8, sauf qu’ELN n’inclut pas les originaux q. *enke et *yuñke ou les sind. yneb et inib (variantes de yneg 12 qui furent modelées d’après minib 11, comme le q. *yunke 12 devint yunque par analogie avec minque 11). Des formes griffonnées au verso du texte II incluent les sind. minib, yneb et les tel. minipe, yumpe, cette dernière évidemment une variante de yúnec(e) 12 modelée d’après minipe (à comparer aussi au tel. kampe 14, lepempe 15, enempe 16 cités dans la note de l’éd. 22).
Les dérivés de √KEW du texte II diffèrent quelque peu de ceux du texte I. Les deux textes donnent les adjectifs q. kéva, tel. cēva, sind. cîw « neuf, frais ». Dans le texte II, le q. keura, tel. ceura, sind. cŷr sont aussi probablement des adjectifs, correspondants au q. keure « renouvelé », tel. ciure, sind. cýr du texte I. Les formes q. keule, tel. ceule, sind. cŷl du texte II n’ont pas d’équivalent dans le texte I, mais semblent être des noms (signifiant peut-être « renouvellement ») se terminant par le suffixe substantif « universel et abstrait » -le (VT 39, p. 16). Le q. keuta du texte II correspond probablement au q. keuta « renouveler, rafraîchir » (tel. ciuta) du texte I. La note « [? aussi] kwe » écrite sous keuta est obscure. Puisque Tolkien rendait occasionnellement le quenya qu par kw dans ces textes (par ex., le q. minque est deux fois orthographié minkwe dans le texte I), kwe pourrait indiquer la forme *que, synonyme de (ou apparentée à) keuta.
Les textes I et II diffèrent aussi légèrement sur un point de phonologie telerine. Dans le texte II, l’eld. com. eu reste inchangé en telerin, par ex., eld. com. keu-rā, keule > tel. ceura, ceule. Dans le texte I, cependant, l’eld. com. eu devient iu en telerin, comme le montre la table des diphtongues au bas de cette page et exemplifié dans des formes telles que le tel. ciure « renouvelé » (q. keure) et le tel. ciuta « renouvelé, rafraîchi » (q. keuta).
enek dérive probablement de NEK « diviser, séparer » mais [? est présumé] modelé sur « milieu » enel/d. Dans l’enseignement du comptage duodécimal avec les mains, les pouces pouvaient être légèrement séparés (plutôt que de se toucher) comme le doigt d’enek, suivi à nouveau par enek après le 2e petit doigt ? 12 serait ainsi yū(e)neke « les deux eneks ».
[? D’où oui] l’eld. com. 12 yūneke est clairement le duel de 6 enek ; yū(e)neke : tel. yūnec(e), sind. yneg, q. yunque. L’occurrence de kw [est] en q. seulement : enque (6) (enekw), yunque (yunekwe).
Comme le texte I, le texte III débute à mi-phrase en haut d’une page, et la première partie de la discussion n’existe plus. Le sujet de la phrase tronquée est à l’évidence le radical eld. com. enek 6, qui « était après le (centre) d’un système duodécimal non-manuel » et était ainsi « présumé modelé sur « milieu » enel/d. ». Des ébauches griffonnées par Tolkien et reliées à ses « Notes sur Óre » (vers 1968) associent de façon similaire les radicaux pour « six » et « milieu » — enet « milieu » est censé être « relié à enek “six” ? comme la partie centrale de douze » et ce concept est illustré par un diagramme : « 0 1 2 3 4 5 |6| 7 8 9 10 11 12 » (VT 41, p. 16, n. 5). Afin que 6 tombe précisément au milieu, ce diagramme débute la séquence de comptage avec 0, un concept qui ne semble pas être exprimé explicitement ailleurs dans les écrits de Tolkien.
Cependant, le texte III note que la source effective d’enek était probablement NEK « diviser, séparer ». Cela se réfère au placement particulier des mains lors de l’enseignement du comptage duodécimal, car à la différence du comptage décimal, dans lequel les mains « étaient mises à plat avec les pouces se touchant » (ELN §3), le texte III dit que dans le comptage duodécimal, « les pouces pouvaient être légèrement séparés (plutôt que de se toucher) comme le doigt d’enek » — c’est-à-dire que l’espace entre les pouces servaient comme d’un sixième « doigt » fictif pour les besoins du comptage. Ainsi, on peut supposer que les Elfes devaient compter de un à cinq sur une main (depuis le pouce jusqu’au petit doigt), puis compter l’espace entre les pouces comme enek six ; sept à onze étaient ensuite comptés du pouce jusqu’au petit doigt de l’autre main, « suivi à nouveau par enek après le 2e petit doigt » (ce second enek indiquant 12 pourrait être à côté du 2e petit doigt, bien que Tolkien ait peut-être voulu indiquer que le comptage se concluait en retournant à l’espace entre les pouces). Cela diffère du compte-rendu de NKE §4, selon lequel enek provenait du comptage décimal avec les mains. Les Elfes commençaient un tel comptage avec le pouce et procédaient vers l’extérieur jusqu’au petit doigt, avec six tombant sur le pouce de la main opposée ; selon qu’ils commençaient à compter sur le pouce droit ou gauche, « quelque soit le sens, 6 viendrait après le vide à [la] fin d’une main ». La racine NEK « diviser, partager, séparer » est citée à la fin de NKE sans plus d’explications, mais l’implication est qu’enek 6 était dérivé de cette base car six venait « après le vide » dans le comptage décimal, c.-à-d., six était le point où le comptage passait au pouce de l’autre main.
Le texte III se conclut en explicitant l’étymologie de l’eld. com. yūneke : c’est « le duel de 6 enek ; yū(e)neke ». L’élément duel yū- apparaît dans « Les Étymologies », qui donnent la base ȲU- « deux, tous deux », d’où le q. yū-, yūyo « tous deux » (RP, p. 461 ; VT 46, p. 23).
En tant que numéraux, 4, 6, 7 ont des radicaux qui n’ont pas de relation apparente avec les positions des doigts ou de noms ludiques dérivés d’eux.
Les radicaux en eld. com. semblent avoir été kan-at 4, enek 6, ot-os 7. Parmi eux, enek est remarquable car (a) il n’apparaît jamais sans l’extension –k et (b) possède, en q. seulement, un w additionnel (*enekwe) — (a) En cela, il ressemble à ened/l : « centre, trois ». Il a peut-être
quelque relation avec ce dernier (puisqu’il l’est numériquement par 2 x 3), mais il n’apparaît jamais sans le e- initial. (b) Le q. –kwe réapparaît dans yunque qui appartient au comptage duodécimal 6/12 plus tardif et est à l’évidence basé sur yu- « tous deux » et enque 6. Si we avait une signification duelle, nous pourrions supposer qu’enek, comme en tel., sind., était à l’origine yun(e)k-we pour « 2 sixaines » à partir duquel, après que la signification de –we fut perdue, -we fut aussi appliqué à enek-. Mais [? nous n’] avons pas d’autre usage de –we comme duel, excepté dans le [? radical] 1. pl. inclusif –we (base ñwe).
Une autre possibilité serait que cette base de six fut nekew, à [? laquelle] e aurait été préfixé à cause de sa relation avec enel- trois mais [? modelé] en eld. com. > enek- [? d’où] en(e)kwe
Dans le texte IV, la proposition selon laquelle les q. yunque 12 et enque 6 pourraient contenir une terminaison duelle –we est particulièrement intéressante. (Si c’est vrai, yunque auraient deux affixes duels, puisque yū- est le duel « tous deux ».) Le Qenya Lexicon mentionne ẆI (U) comme « la racine de plusieurs formes duelles » (PE 12, p. 33, s.v. ATA), mais le texte IV affirme qu’il n’y a pas d’autre usage connu de –we comme duel « excepté dans le [? radical] 1. pl. inclusif –we (base ñwe). » La dérivation du pronom de la 1ère personne du pluriel à partir d’un élément duel dépend peut-être du fait que le 1. pl. inclusif avait deux points de référence, le locuteur et le destinataire (« toi et moi/nous »), tandis que l’exclusif en a seulement un, le locuteur (« nous, ne t’incluant pas »).
Un texte contemporain intitulé « Voyelles finales en eld. com. et les langues dérivées » (tapé sur les omniprésents vieux papiers Allen & Unwin de 1968) fournit plus d’informations sur les origines du 1. pl. inclusif –we, ñwe (bien qu’il ne mentionne pas de sens duel). Après avoir noté que les pronoms en eld. com. de la 1ère personne pl. étaient me (exclusif de la personne destinataire) et we, ñwe (inclusif), ce texte explique que le 1. pl. inclusif « avait comme [sa] forme ancienne ñwe … il était dérivé de me et non l’inverse : il avait en quelque sorte un radical nasal similaire mais pas identique à m. Le radical q. indépendant we- présente une perte de ñ (il aurait dû, par de libres changements, rester ñwe, puisque le ñ initial ne fut pas perdu en q.), en partie peut-être pour augmenter la dissemblance de me et ñwe, et aussi car dans une inflexion verbale, le ñ fut perdu après l’infixe pluriel l- qui, en q., précède les éléments pronominaux sujets. »
Le 1. pl. inclusif –lwe dans navilwe « nous jugeons » (tiré d’un essai très tardif, VT 42, p. 34) consiste ainsi en l’infixe pluriel l- + (ñ)we. La terminaison possessive –lvo « de nous » (inflexion génitive de *-lva « notre ») dans omentielvo « de notre rencontre » a probablement la même dérivation, mais montre le changement de w > v qui prenait place dans certains environnements dans le quenya parlé par les Exilés, auquel il est fait allusion dans la note de l’auteur 5 à ELN (cp. aussi wilya > vilya « air, ciel », RR, p. 490). La forme ñwe sans l’infixe pluriel l- est apparemment la source du tel. –nguo « de nos », dans le tel. vomentienguo « de la rencontre de nos chemins » = q. omentielvo (MR, p. 367, 407). Le q. *n(g)win (*n(g)wen ?) *« pour nous » dans l’inscription en tengwar *Sí man i·yulmar n(g)win enquatuva de 1954, *Qui maintenant remplira pour nous les coupes ? » (VT 21, p. 6, 10) semble aussi dériver d’une forme de ñwe.
Le texte IV se termine en mentionnant brièvement une théorie alternative selon laquelle la base de 6 était nekew. Ce fut probablement un concept éphémère puisqu’il contredit les affirmations des textes III et IV que le radical enekw- avec ajout du w apparaît seulement en quenya ; ainsi le q. enque, mais le tel. enec(e), sind. eneg (l’appendice aux « Rivières » dit aussi d’en-ek(w) 6 que « le (w) apparaît seulement en quenya » ; VT 42, p. 24). De plus, les bases étendues avec un W comme troisième consonne sont extrêmement rares. Le seul exemple dans « Les Étymologies » est TERÉW- « percer » et elle fut remplacée par TER-, TERES- (VT 46, p. 18).
es notes linguistiques qui se trouvent associées au Schibboleth of Fëanor et au Problem of Ros (voir VT 47, p. 18 n. 6) fournissent le bref compte-rendu suivant sur les fractions 1 ‒ 12 en quenya :
√sat diviser, répartir. etsat distribuer en mêmes portions. estat.
asta division, une partie (en part. une d’autres parties égales) ; de l’année, d’un mois ou d’une période. ránasta mois lunaire.
Ainsi peresta ou perta 1/2. nelesta, neldesta, nelta 1/3. kanasta, kasta 1/4. lepesta 1/5. enquesta
1/6. otosta, osta 1/7. tolosta, tosta 1/8. neresta, nesta 1/9. kaista, kast 1/10. minquesta
[1/11]. yunquesta [1/12].
nelsat, kansat, lepsat, otsat, tolsat, nersat. kainastanótie système décimal.
Les formes alternatives plus courtes nelta 1/3, kasta 1/4, osta 1/7, nesta 1/9 et kast 1/10 étaient des ajouts plus tardifs et « peresta ou perta 1/2 » fut ajouté dans la marge. Les formes minquesta et yunquesta furent écrites à l’écart au bas de la page manuscrite, séparées du tableau par diverses notes phonologiques sans lien. La racine √sat « diviser, répartir » apparaît aussi dans « Les Rivières et collines des feux de Gondor » sous la forme SAT « diviser, délimiter » (VT 42, p. 19–20), avec des dérivés se référant aux divisions de l’espace (sind. sad « un lieu, point », comme dans le nom de colline Calenhad « espace vert ») et aux divisions de l’espace (q. asta « une division de l’année, un “mois” »). Le préfixe et- « hors » (RP, p. 403) apparaît dans etsat « distribuer en mêmes portions » ; la variante estat est peut-être une modification purement euphonique, puisque ts ne se transpose pas régulièrement en st en quenya — cp. le q. etsir « embouchure d’une rivière » < etsiri *« écoulement » (ibid.), de et- « hors » et sir- « couler » (RP, p. 442).
La note sur les fractions élargit la définition d’asta pour inclure un sens spatial — « division, une partie (en part. l’une d’autres parties égales) » — en plus du sens temporel familier de « mois ». Le suffixe fractionnel –sta est peut-être une forme abréviée du nom asta dans son sens de « division, une partie ». –sta est parfois ajouté à la forme cardinale pleine d’un numéral, comme neldesta 1/3, enquesta 1/6, minquesta 1/11, yunquesta 1/12, mais est plus souvent ajouté à une forme raccourcie du radical numérique :
Radical CVCV étendu sans consonne finale. — Dans nelesta 1/3, kanasta 1/4, lepesta 1/5, otosta 1/7 et tolosta 1/8, les consonnes finales des radicaux étendus neled- 3, kanat- 4, lepen- 5, otos- 7 et tolod- 8 sont absentes (ayant probablement été assimilées au –s- du suffixe — par ex., *neled-stā > *neles-stā > nelesta). neresta 1/9 semble aussi appartenir à ce groupe, mais le véritable radical historique pour « neuf » était neter- (cp. le tel. neter, sind. neder dans ELN §8). Ainsi neresta n’était pas formé à partir de l’eld. com. neter-, mais plutôt tiré de ner- dans la forme quenya plus tardive nerte 9. Au q. kanasta 1/4, cp. le nold. canath « quart », le nom d’une pièce d’argent (le quart d’un mirian) dans une ancienne version de l’Appendice F du Seigneur des Anneaux datant de c. 1950 (PM, p. 45).
Radical CVC sans extension. — Dans nelta 1/3, l’extension entière –ed- du radical neled- 3 est absente et le suffixe –sta est réduit en –ta ; cette forme réduite du suffixe apparaît aussi dans perta 1/2 (< PER- « diviser au milieu, couper en deux » ; RP, p. 435). Dans ces cas, la réduction de –sta > -ta était probablement là pour éviter les combinaisons consonantiques –lst- et –rst-. kaista 1/10, comme nelta, omet l’extension entière du radical (√kayan, pour lequel voir ci-dessous), bien que dans ce cas, le suffixe –sta puisse garder sa forme pleine. kaista apparaît aussi comme le premier élément de kaistanótie « système décimal » dans la même note — à comparer au q. maquanotie « système décimal » dans MDN §16, dans lequel le premier élément est maqua « groupe de cinq choses (similaires) », avec le duel maquat « groupe de dix » (VT 47, p. 7, 10). Les formes CVC des radicaux numériques sont aussi utilisées dans la liste des terminaisons alternatives de fractions en –sat : nelsat (1/3), kansat (1/4), lepsat (1/5), otsat (1/7), tolsat (1/8), nersat (1/9) — cette dernière forme, comme neresta 1/9, est modelée sur le q. nerte 9 plutôt que sur l’eld. com. neter-.
Réduction de radical en CV. — Dans kasta 1/4, tosta 1/8, nesta 1/9 et kast 1/10, les radicaux numériques sont réduits à leurs consonne et voyelle initiales : ka- < kanat-, to- < tolod-, ne- < q. nerte et ka- < √kayan. Dans osta 1/7, le radical est réduit à une seule voyelle, o- < otos-. kast 1/10 est inhabituel en ce que les formes avec un –st final en quenya semblent par ailleurs n’intervenir que dans des documents anciens et, dans ce cas, seulement rarement : le Qenya Lexicon a seulement est « extérieur » (adj.) et sist « ulcère, plaie » (PE 12, p. 36, 86). En supposant que kast n’ait pas été simplement abandonné avant d’avoir été complété, sa terminaison –st était peut-être due au besoin pratique de distinguer cette fraction de kasta 1/4.
Au bas de la même page manuscrite que la table des fractions se trouve écrite la note suivante à propos du mot pour « dix » :
Dix NE doit PAS être kainen ; cela = je reposais
keante.
√kayan > kea(n) & kaina aj.
Bien que le q. kainen « dix » soit ici rejeté, la racine √kayan de laquelle sont dérivés les nouvelles formes kea(n) (probablement un nom) et l’adj. kaina est identique à la base KAYAN- donnée dans « Les Étymologies » comme la source de kainen. kea(n) montre le développement de aya > ea vue dans les formes telles que le q. fëa « esprit » < *phăya (MR, p. 349), et omet le suffixe –en, dont l’origine est incertaine. Dans la Early Qenya Grammar (c. 1923), kainen est analysée comme kai « dix » + partitif –ĭnen (PE 14, p. 82), mais cela ne peut clairement pas s’appliquer au kainen < KAYAN- des « Étymologies », où la terminaison –en est peut-être apparentée au gén. sing. –en appliqué, à cette époque-là, aux noms se terminant par une consonne, par ex., le q. ailin « étang, lac », gén. sing. ailinen (RP, p. 393). Les nouvelles formes kea(n) et kaina ne survécurent pas longtemps. Dans « Les Rivières et collines des feux d’alarme de Gondor » — presque certainement un texte plus tardif, datant de mi-1969 ou plus tard (VT 42, p. 6–7) — le radical pour « dix » est kwaya, kwayam « tout, le lot complet, tous les dix doigts » (VT 42, p. 24), d’où l’ordinal quenya quainea 10e ; et ELN §8 fournit les formes cardinales correspondantes, quean (quain) 10.
Tolkien affirme dans la note ci-dessus que kainen signifie « je reposais », c.-à-d. que c’est la 1ère pers. sing. au passé (kaine « reposais » + -n « je ») du verbe caita « reposer, s’étendre » observée dans la Lamentation de Galadriel (FdA, p. 476) — cp. poita « purifier », pas. poine dans le Qenya Lexicon s.v. POYO. Le pas. kaine est aussi attesté dans la forme progressive kakainen « étaient allongés » dans la « Koivienéni Sentence », qui date d’environ 1937–1941 (VT 27, p. 7–9) ; la réduplication dans le radical (kakai-) est décrite, dans des écrits contemporains sur les verbes en quenya, comme un moyen d’indiquer une action continue et le –n final est un suffixe pluriel apparaissant dans plusieurs autres verbes de la même page manuscrite que kakainen. La forme keante écrite en-dessous de kainen est un passé alternatif de caita (sans flexion pour la personne) et est attesté par ailleurs dans les écrits de Tolkien des années 1960. Il est formé par infixation nasale de caita (*kaya-n-tē, non attestée par Tolkien) et a ainsi le même type de formation que öante < *áwa-n-tē, pas. d’auta « s’en aller, quitter » (WJ, p. 366).
Comparaison avec les fractions en qenya premier. — Les textes manuscrit et dactylographié de la Early Qenya Grammar (c. 1923) présentent tous deux des listes de fractions en qenya (PE 14, p. 51, 84–85). Le suffixe fractionnel dans ces listes anciennes a la forme basique –to, comme dans enekto « 6e » (< radical *enek- ; cp. enqe, enekse « six »), mais il apparaît plus souvent sous les formes modifiées –tto, -nto et –sto. La façon dont les consonnes des racines eldarines et des éléments formatifs furent modifiées pour produire les variantes sont détaillées dans la Early Qenya Grammar (voir PE 14, 63–66) et parmi les nombreux exemples cités se trouve la terminaison adverbiale –ta qui a les variantes –tta, -nta, -sta et -ti̯a (PE 14, p. 66), fournissant un parallèle morphologique proche du suffixe fractionnel –to et de ses variantes –tto, -nto et –sto.
Dans la liste manuscrite (PE 14, p. 51), la terminaison fractionnelle la plus commune est –tto, qui intervient dans dix formes, par ex. otsotto « 7e », huetto « 9e » et yunqetto « 12e ». La terminaison –sto apparaît seulement dans trois fractions, toutes formées de numéraux avec d ou t pour consonnes finales, par ex. neldesto « 3e » et kantasto « quart, quatrième ». Il n’y a aucune occurrence certaine de -nto — leminto « cinquième » (< lemin « cinq ») et yukainento « 20e » (< yukainen « vingt ») représentent probablement lemin-to, yukainen-to. Cependant, dans la version subséquente de la liste dactylographiée, -tto disparaît sans laisser de trace et –sto devient la terminaison la plus commune, vue dans neuf formes, par ex. enqesto « 6e », toltosto « 8e » et minqesto « 11e ». La variante –nto apparaît dans quatre formes, toutes dérivées de numéraux avec s ou r en consonne finale, par ex. tuksanto « 100e » et mindórinto « 1 000 000e » et la forme simple –to apparaît encore dans enekto « 6e » (une variante d’enqesto), leminto « 5e » et yukainento « 20e ». Le suffixe fractionnel –sto de ces anciennes listes est clairement un prédécesseur conceptuel de –sta de la liste plus récente de c. 1968. Même si quelque 45 ans les séparent, plusieurs fractions de la EQG diffèrent seulement de leurs pendants plus récents en ayant –o plutôt que –a comme voyelle finale : EQG neldesto « 3e » et le récent neldesta, kantasto « quart, quatrième » et kanasta, enqesto « 6e » et enquesta, et minqesto « 11e » et minquesta. D’autres fractions de EQG diffèrent dans une plus grande mesure de leurs pendants plus récents, mais sont toujours étonnamment similaires, en particulier toltosto « 8e » et tolosta et kesto « 10e » et kaista. Cependant, les étymologies de l’ancien –sto et du –sta plus tardif sont apparemment complètement différentes : le –sta plus tardif est explicitement dérivé de √SAT « diviser, partager », tandis que l’ancien –sto provient de la forme basique –to de laquelle sont dérivés –sto, -nto et –tto par modification consonantique. Le –to fractionnel n’a aucune relation étymologique claire en qenya premier. Le Qenya Lexicon donne un suffixe réfléchi –to comme variante de –ko (< KOHO « subir, endurer ») et –to intervient également fréquemment dans le QL comme suffixe verbal (par ex. sokto- « donner à boire, baigner » < SOKO *« boire ») et comme suffixe nominal (laito « jeunesse, vigueur, nouvelle vie » < LAẎA « être vivant, fleurir »), mais ceux-ci semblent des candidats douteux comme source du –to fractionnel.
La racine √nip « petit », dit avoir habituellement une « connotation de faiblesse » (les mots « ou inutile » furent ajoutés au-dessus de la fin de la glose, puis biffés), doit être la source du sind. niben « petit », probablement via le *nipinā primitif. C’est d’autant plus confirmé par la traduction de (sind.) nimp, qui fut d’abord écrite comme « petit & frêle, ou petit, insignifiant », avec « insignifiant » biffé par la suite. Le sens péjoratif « petit & frêle » s’applique certainement aux Noegyth Nibin, qui n’étaient pas seulement « plus petits que la norme de leur race » (WJ, p. 408), mais aussi plus faibles quant à la diminution de leur art de la forge, leur existence furtive et leur nombre décroissant (Silm., p. 194). Puisque les noms ludiques illustrent les doigts comme les membres d’une famille imaginaire, le sind. niben comme nom pour le « bébé » était probablement destiné à être *« le petit (et frêle) ».petit √nik adj. níka, ninkĭ. Sens positif.
√nip nípa, nimpĭ. Habituellement avec une connotation de faiblesse.
nimp = petit & frêle, ou petit
Suffixe -inkĭ. lepinke petit doigt.
Aussi comme adj. luininkĭ bleuâtre.
-ikki, -iksi. Aussi radical autorisé + i
comme wēn- femme, wendi jeune ou petite femme, demoiselle.
-si, -ensi. –ki, wenki.
Ici le q. atta 2 est qualifié d’« inexpliqué » car, à l’inverse du tel. tat et du sind. tad, il ne peut pas dériver de l’eld. com. tat(ă), dont la forme quenya serait *tat. La note suggère que le q. atta pourrait avoir été modelé d’après attat « deux pères », un nom ludique pour les pouces comme « paire remarquable » dans la représentation à deux mains. Puisque les numéraux pour 1 et 2, sont dits ici être plus vieux que les noms ludiques, cela implique que le q. atta 2 était un remplacement ultérieur de quelque numéral antérieur (ELN §2 affirme de façon similaire que « [l]es nombres 1, 2 … étaient probablement les plus vieux et n’étaient pas, à l’origine, nécessairement reliés aux doigts »). Ce numéral antérieur était peut-être le q. *tat < eld. com. tat(ă) comme proposé ci-dessus, ou le q. *tata si l’on suppose la forme variante de l’eld. com. *tatā ; comparer Tata « Deux », nom du père-elfe primordial des Ñoldor dans la légende de l’éveil des Elfes (WJ, p. 380, 421–423).NB. Seul le q. avait atta 2. Et NB. sind. –ath < atta ne fut jamais limité au duel mais était < atta, mais asta est utilisé en q. comme un suffixe de groupe. L’eld. com. tat(ă) n’était pas relié aux noms ludiques (1, 2 étaient plus anciens) mais est probablement pronominal ta ta 1, 2 en comptage primitif. La base de père est at vraisemblablement comme atar, de mère am, em ? (amal, emel, emer). Les formes familières (de famille) étaient [atta »] atto, emme ou atya, emya pour at-nya, em-nya mon père / ma mère.
Mais à noter que ce q. atta inexpliqué pourrait être influencé, car les 2 pouces dans la représentation à 2 mains étaient une paire remarquable et [? nommée comme] une paire [attot »] attat 2 pères ou voisins.